Critique : Les fantômes ont toujours hanté le cinéma, et ce depuis la première œuvre. Le cas du film du jour, « Enzo », a beau être particulier, il relève du besoin de la création à faire vivre les morts et à leur permettre de respirer encore au-delà de la perte. Car le long-métrage a beau être réalisé par Robin Campillo, il n’en reste pas moins une œuvre de Laurent Tirard, qui a longuement travaillé dessus avant son décès. C’est donc son collaborateur artistique mais surtout son ami qui a pris la relève pour faire exister ce récit d’adolescent cherchant, dans la moiteur de la chaleur estivale, à réellement se découvrir tel qu’il est.

La notion d’immortalité par la création est rapidement présente, Enzo déclarant son amour de la construction par le fait d’avoir un bâtiment qui tienne et survive au-delà du corps. Cet aspect reste une pensée de fond qui accentue la mue du jeune homme, ne trouvant nulle part sa place tout en se voyant confronté à ses propres privilèges. Le mal-être qui en résulte reste tangible, porté par la partition toute en finesse d’Eloy Pohu. La caméra de Campillo/Tirard reste au plus près de lui, trouvant dans une photographie lumineuse le renforcement de doutes et de questionnements où le jeune homme pensera trouver sa voie dans un collègue ukrainien. Le film n’hésitera pas à parler du conflit en cours, appuyant ce rapport à une mortalité faussement éloignée et renforçant une énergie de vie.

C’est par ce dernier point que le long-métrage nous convainc le plus, « Enzo » conservant une beauté funeste faussement dissimulée mais renvoyant à une période de débat constant où les impositions de l’âge adulte se font peu à peu plus écrasantes. Peut-être que son atmosphère ne plaira pas à tout le monde mais il n’empêche que Robin Campillo filme joliment à la Laurent Tirard et ramène un besoin de vivre au-delà du drame, comme un bouillonnement à célébrer tant que le cœur bat encore.

Résumé : Enzo, 16 ans, est apprenti maçon à La Ciotat. Pressé par son père qui le voyait faire des études supérieures, le jeune homme cherche à échapper au cadre confortable mais étouffant de la villa familiale. C’est sur les chantiers, au contact de Vlad, un collègue ukrainien, qu’Enzo va entrevoir un nouvel horizon.