Réveil qui sonne, café qui coule, ordinateur qui ronronne, feu qui allume une cigarette. Nous avons tous notre petit rituel avant de se mettre au travail, cette routine qui, lorsqu’on la réalise, signifie qu’il faut être sérieux. Parmi ces habitudes, il en existe une plutôt moderne, celle de mettre une Boiler Room sur un onglet perdu parmi tant d’autres.
Il y a encore quelques années, ces deux mots barbares étaient inconnus de tous. Seulement, le constat s’impose à nous: en moins d’une décennie, ce qui partait d’une envie de faire la fête entre deux amis est devenu un réel empire qui a drastiquement révolutionné notre manière de consommer la musique.
Boiler Room est une idée simple et redoutablement efficace: on invite les meilleurs Dj au monde à jouer face à une caméra Go Pro et on donne la chance à quelques ( très, très peu ) amateurs de danser autour de l’artiste. On diffuse le tout sur internet et après quelques années… on a créé la plus grande banque de prestations lives mondiale concernant la musique électronique.
Que vous saliviez à l’annonce de ces mots à la traduction douteuse ou que vous découvriez le concept à la lecture de cet article, nous vous proposons de revenir sur la folle épopée de Boiler Room.
L’HISTOIRE
Tout commence lorsque Blaise Bellville et Thristian Richards se rencontrent dans les locaux du webmagazine Platform à Londres en 2010. La capitale anglaise a toujours été le foyer d’une grande scène underground tout style confondu, et les deux amis en font bien partie. Alors qu’ils sont entourés de personnes qui travaillent dans cette industrie, au détour d’une session entre amis; émerge l’idée de fixer une caméra au dessus des platines. La fête prend de l’ampleur en invitant peu à peu plus de monde et la caméra diffuse alors en live sur la plateforme Ustream.
Jamais les deux compères n’ont eu la volonté de créer quelque chose de grand mais Boiler Room était né. D’après la légende, le nom ferait écho à l’endroit où l’une des premières soirées devait avoir lieu à savoir… une chaufferie! Manque de bol, la présence d’une trop grande quantité d’amiante a rendu impossible la fête.
Dès leurs débuts, les Boiler Room attirent. Jamie XX et Caribou posent leurs mains sur les platines rapidement puis s’enchaîneront les grands noms du genre à la vitesse de la lumière. Kaytranada en 2013, Maceo Plex l’année suivante et tellement d’autres que faire une liste nous prendrait des heures entières.
A l’image de Rome, la marque ne s’est pas faite une notoriété mondiale en un jour. Établie à Londres, elle s’est développée en Europe ( Berlin d’abord, Glasgow, Moscou, Paris ensuite… ) mais ne s’est pas arrêtée en si bon chemin. A la conquête du monde, cette idée révolutionnaire prend d’assaut l’Amérique et l’Asie. Commençant à gagner en légitimité et en reconnaissance dans le milieu, la marque s’est vu attribuée sa propre scène et a commencé à enregistrer en plein festival et pas des moindres. De Dekmantel à Amsterdam au Dimensions festival en Croatie en passant par les Nuits Sonores à Lyon ( cocorico! ), Boiler Room a vu son logo affiché partout et tout le temps.
Une expansion désormais achevée pourrions-nous penser… Pas du tout. Le président qui n’est autre que Blaise Bellville ( le créateur à l’origine ) confie régulièrement son envie d’aller toujours plus loin. Géographiquement, les Boiler investissent toujours plus des villes étonnantes ( Marseille, Tulum, Cracovie… ) afin de rendre accessible cette institution à un public de plus en plus international. Grâce à des collaborations avec des marques comme Vans, Ray ban ou encore le whisky Ballantine’s, ce projet a pu voir mais surtout réaliser les choses en grand.
Le plus important reste la musique et croyez-nous elle n’a pas été oubliée. Les styles se sont ( énormément ) élargis comme en témoigne leur site en proposant des Boiler d’une quarantaine de genres différents comme l’Acid, le Disco, la Speedcore ou encore la Grime, style typiquement anglo-saxon. Les lives se sont même ouverts à des ovnis dont on se demande comment la collaboration a été rendue possible comme une Boiler Room réalisée par Thom Yorke ( leader de Radiohead ), le rappeur Denzel Curry…
Le succès leur a ouvert les portes et ils ont à leur tour inspiré d’autres acteurs du milieu. Le plus connu reste Cercle qui propose le même concept en tentant de se démarquer par l’originalité des lieux choisis ( Tour Eiffel, la plus grande étendue de sel au monde en Bolivie, la fac de médecine de Montpellier… ). Il est impossible de ne pas vous parler également de toutes les chaînes YouTube qui ont pour objet les deux mastodontes, témoignant de toute une culture qui se crée autour de ce streaming new age. D’une part, il y a People of Boiler Room qui référence tous les moments immortalisés par la Go Pro dont certains se passeraient bien.. Au rendez-vous? Prise de drogue, moments gênants et danses à en faire pâlir les plus grands conservatoires. D’autre part, Toilets Room et Rond se chargeront de vous faire rire en parodiant ce concept.
Afin de mieux analyser cette idée révolutionnaire, nous vous proposons une sélection loin d’être exhaustive de prestations chères à nos yeux. Évidemment, avec 6543 vidéos à leur actif sur Youtube, vous présenter 10 prestations n’est qu’un échantillon de tout ce que cette chaîne a de fantastique à vous proposer. Le meilleur moyen de s’en rendre compte est de se perdre dans leurs archives, découvrir de nouveaux artistes et s’ouvrir à de nouveaux genres.
BOILER ROOM EN 10 PRESTATIONS
On commence immédiatement avec du lourd. Ce jeune anglais a mixé pour Boiler Room une heure de house purement jouissive. Dans un festival proche de la ville de Belfast, on assiste à une fête exceptionnelle célébrant les valeurs de ce type de musique: amour et respect.
Cette Dj-ette inconnue au bataillon il y a encore quelques années récidive dans cette Boiler pour lâcher un set d’AN-THO-LO-GIE. Un subtil mélange de classiques avec une house explosive sont la recette de ce set tout droit sorti des terres australiennes.
KERRI CHANDLER B2B JEREMY UNDERGROUND
On attaque désormais les choses sérieuses avec un B2B ( pour back 2′ back, lorsque deux artistes décident de jouer ensemble ) de légendes. D’un côté, Kerri Chandler, auteur de nombreux classiques et d’une carrière époustouflante. Joue à côté de lui Jeremy Underground, grand amoureux de la musique house depuis toujours. La sauce prend et ce duo formé pour l’occasion à Londres a régalé le public pendant un peu plus de 2 heures.
L’une des Boiler les plus récentes de ce top mais aussi l’une des plus importantes de la chaîne. Cette jeune artiste distille pendant une heure une techno mélodieuse absolument géniale en… Palestine! Quelle beauté dans le message que transmet cette vidéo, voir un peuple danser, briser les codes et sourire au passage du dernier morceau sobrement intitulé » No War « . L’initiative est géniale, on espère sincèrement que ce projet aura une influence quelconque sur le monde actuel.
Dans la catégorie prestation déroutante, The Horrorist se positionne plutôt bien. Dans un style qui ne plaira pas à tous au premier abord, l’artiste présente une autre facette de ce type de musique, avec des tonalités plutôt brutales. Nous ne sommes pas sûrs que tout le monde y trouve son bonheur à la première écoute mais pourquoi pas y revenir plus tard!
La reine du techno-game s’est évidemment essayée à l’exercice. Nous pouvions nous attendre à une heure de techno plutôt classique, dans le style Kraviz. Quelle surprise de découvrir l’artiste en 2013 jouer des sonorités bien plus menteales avec une construction de set très intéressante. Nina, dans ce style, on veut te voir plus souvent!
L’un des premiers patrons de la house music a été capturé par les caméras de Boiler Room quelques mois avant son décès. Une réelle leçon de musique, tant qualitative qu’historique. Un set que nous nous donnerons plaisir à écouter encore et encore et s’imaginer ce qu’était la House à Chicago aux origines.
The Black Madonna est une performeuse capable de jouer un large éventail de sonorités différentes. Dans cette Boiler enregistrée directement chez son disquaire, l’américaine chante les louanges de la house music directement dans son foyer: Chicago. Le choix des morceaux est vraiment sublime, groovy à souhait.
Ce jeune espagnol aime quand ça claque fort et vite. Il a accédé au privilège de la Boiler Room récemment et n’a pas raté l’occasion. En pas moins d’une petite heure, il montre ce qu’il sait faire de mieux et ça décoiffe!
Dernière proposition de cette liste, encore une femme, de quoi casser les codes! Un set tout en brutalité qui démontre que la femme n’est pas qu’un argument de vente dans ce milieu. Enregistré durant le festival Dekmantel, le public est bouillant et nous aussi, bien qu’allongés dans notre lit.
Nous nous devons également de mentionner la récente Boiler Room de Robert Hood, donnant une réelle leçon d’histoire de la Techno » made in Detroit » à base de classiques et vocaux entêtants. Nicola Cruz a également proposé un set, perdu au milieu d’un désert proche de Tulum. Envoûtant, mystique, magnifique.
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