Développeur : ID Software
Editeur : Bethesda Softwworks
Genre : FPS
Plateformes : PC (version du test)/PS4/Xbox One/Nintendo Switch
Pegi: 18+
Relancer une franchise comme Doom en 2016 équivalait à se jeter du haut d’une falaise sans parachute : un aller simple vers le cimetière. En effet, après la catastrophe qu’avait été Duke Nukem Forever, il y avait de quoi s’inquiéter, surtout avec une licence aussi appréciée. Mais c’était sans compter les talents en nécromancie de Bethesda qui, avec ID Software (papa de Doom, Wolfenstein, Quake …), avait déjà réussi à relancer le cultissime Wolfenstein. De plus, le terrain avait déjà été préparé, avec quelques reboots de licences de FPS des années 90, notamment l’excellent Shadow Warrior de 2013, qui avait réussi à moderniser une saga vieille de plus de 15 ans. L’exercice restait cependant risqué, notamment à cause de la réputation de « père des FPS » de Doom …
L’hommage que l’on attendait
Doom 2016, c’est le défouloir par excellence. Vous vous réveillez sur Mars, vous éclatez la tête d’un démon sur l’autel auquel vous étiez attaché, vous récupérez armes et armure, et vous vous lancez dans la plus grande chasse au monstre que l’univers n’ait jamais connu. Si vous vous attendiez à de la subtilité, il faudra passer votre chemin : Doom ne fait pas dans la dentelle. Si le premier jeu avait déjà déclenché des polémiques à sa sortie en 1993, celui-ci aurait fait faire une crise cardiaque à tous les parents du monde s’il avait été disponible à la même époque. Le jeu est en effet un hommage très appuyé au premier Doom, et notamment à son mod « Brutal Doom » qui l’avait rendu plus rapide et violent.
La principale nouveauté de ce nouvel épisode, bien entendu inspiré de « Brutal Doom », ce sont les glory kills. Si vous affaiblissez suffisamment vos ennemis, ils s’arrêteront de courir et brilleront. Ce sera alors l’occasion de les achever de manière brutale d’une simple pression de touche. Et sur ce point, les développeurs ont eu de l’imagination : arrachage de mâchoire, de colonnes vertébrales ou de cornes pour frapper le démon en question avec, coup de genou dans le crâne, ou même faire manger son propre coeur à un ennemi : il n’y a aucune limite. Si cette mécanique fait mouche pendant les premières heures de jeu, leur sur-utilisation a cependant tendance à rendre le jeu bien trop simple (les ennemis lâchant des points de santé à chaque glory kill) et répétitif, et on se contentera d’un bon coup de double fusil à pompe dans les rotules pour achever ces horreurs.
En plus de ces glory kills, tout l’arsenal classique du taciturne Doom Guy est disponible, du fusil à pompe au lance-roquette, en passant par le mythique BFG 9000 (BFG signifiant « Big Fucking Gun », on vous avez prévenu que la subtilité n’était pas le fort de Doom). Quant au gameplay, toujours aussi nerveux, il a également été rendu plus fluide. Si on retrouve les grands espaces propres à la série et propices au massacre inter-espèces, l’ajout du double saut et la possibilité de se hisser depuis le bord d’une plateforme permet de bouger bien plus rapidement.On retrouvera d’ailleurs la présence de secrets, comme dans le premier Doom, qui incitent à explorer un peu les cartes, notamment pour trouver les petites figurines du Doom Guy. Un hommage fort sympathique, mais vite rendu trop simple par la présence de la carte indiquant l’endroit où se trouvent ces dernières.
On notera cependant une petite déception concernant le rythme, un peu trop haché, la faute à des phases de combat intenses souvent suivies par des phases d’exploration inintéressantes et brouillonnes, notamment à cause d’une carte pas toujours claire. L’équilibre sera cependant rétabli vers la fin du jeu, avec des combats qui s’enchaînent sans repos et une difficulté plus corsée.
Enfin, il est indispensable de parler de la prouesse artistique accompli sur cet épisode de la licence. Les graphismes sont somptueux, et les ennemis classiques de la série ont tous été recréés dans un style moderne, sans pour autant trahir les modèles originaux. En terme de musique, le jeu rend hommage aux inspirations metal du premier Doom, avec une bande-son musclée à base de batterie martelée et de basse à réveiller les morts. Mick Gordon a fait un travail d’orfèvre, rendant les combats encore plus intenses.
En bref, cette nouvelle mouture de Doom a gardé ce qui faisait l’essence de la série, à savoir sa brutalité et sa nervosité, tout en les améliorant assez pour que le jeu soit cohérent avec ce qui se fait désormais en matière de FPS.
Trop moderne ?
Le problème quand on redémarre une série, c’est qu’il faut justement l’adapter à l’ère du temps, et c’est justement ce qui fait défaut à cette version de Doom. Si les changements notés dans la première partie sont mineurs et permettent d’améliorer la recette de base du jeu, tous ne sont pas aussi appréciables.
En effet, Doom a voulu trop se moderniser, notamment en laissant des choix au joueur. Au fur et à mesure de votre croisière en enfer, vous trouverez de nombreux mods d’armes, des points d’armure et d’armes, des runes, des artefacts et que sais-je encore. Loin d’être une mauvaise idée, ces derniers permettent d’insuffler un peu de fraîcheur dans un jeu qui autrement serait assez vite répétitif. Le problème, c’est que toutes ces aides disséminés plus ou moins discrètement dans les cartes, facilitent beaucoup le jeu et ne sont pas toujours utiles (on pense notamment modes de tirs, trop nombreux pour être tous utilisés). De même, les améliorations d’armure ne seront pas toutes utiles, ou vous rendront bien trop rapide ou puissant.
Cette nouvelle mouture de Doom vous mettra également face à des boss. Arrivant plutôt tardivement dans l’aventure, ces derniers donnent l’impression que les développeurs ont été obligés d’en mettre pour plaire aux joueurs de FPS actuels et remplir leur cahier des charges. Là où Shadow Warrior avait réussi à rendre les combats de boss intéressants, notamment car ils demandaient une certaine maîtrise des techniques du jeu, on se retrouve ici face à trois boss ultra scriptés qu’il suffira de bourrer pour passer au niveau suivant. Pire, le dernier boss, celui sur lequel se finit le jeu, est une énorme déception, car beaucoup trop simple. Dommage, quand on pense que ces créatures monstrueuses aurait pu donner des affrontements dantesques.
Enfin, la dernière grosse nouveauté de ce Doom 2016, c’est la présence d’un mode multijoueur, avec tout ce que cela implique de modes de jeu classiques (capture de drapeau, match à mort …). Ce dernier est à nouveau en demi-teinte. On y retrouve l’ambiance des parties de Quake, quoique plus molle, mais la modernisation abusive est à nouveau passée par là. Là où le multijoueur des jeux d’ID Software dans les années 90 demandaient un entraînement certain avant de réussir à gagner, ici il sera question de gagner de l’expérience pour gagner des armes et des runes afin de gagner en puissance. Il est donc probable que vous vous fassiez rétamer lors de vos premières parties, vos adversaires ayant déjà eu a possibilité de débloquer les meilleurs armes. En effet, ici, hors de question de ramasser des armes, comme avant : tout se fait par loadout. Vous devrez donc choisir vos armes avant de vous lancer dans la bataille, ce qui est un peu dommage. On notera également le manque d’ambiance totale lors des parties multijoueurs, la faute à une musique absente (pourquoi donc ?!) et à une voix monotone pour annoncer les scores. Petit point positif pour l’apparition des runes démoniaques, vous permettant de vous transformer en démon pour aller massacrer l’équipe adverse. Le multijoueur reste cependant solide plaisant à jouer, et vous serez probablement content de faire quelques parties de temps à autres.
Alors, on y joue?
Doom 2016 se voulait l’authentique successeur du premier Doom. Si le solo réussit le pari avec adresse, la surmodernisation du titre vient cependant assombrir le tableau. Le mode multijoueur, quant à lui, est une déception, malgré la présence de quelques bonnes idées. Au final, Doom 2016 remplit sa part du marché: offrir à nouveau aux nostalgiques un défouloir digne du « père des FPS ». Bon, mais pas exempt de défauts donc.