C’est devenu assez rapidement un des événements cinéma de l’année : « Godzilla Minus One » est disponible depuis quelques semaines en édition physique chez AllTheAnime, avec notamment une édition collector comprenant la version du film en noir et blanc. Il était donc évident que nous devions poser quelques mots sur ce film dévastateur et réussi.

L’ouverture du film pose directement les bases de ses réflexions : alors que la seconde guerre mondiale va vers sa fin, Koichi, un pilote kamikaze, ne remplit pas sa tâche et se pose plutôt sur un îlot destiné à la réparation d’avions. C’est là qu’apparaît pour la première fois Godzilla, avec une gestion visuelle qui impose directement l’intérêt. La scène est nocturne, la nature gigantesque de la créature impose une lourdeur ainsi qu’une menace forte. Cette introduction servira ainsi de traumatisme tangible qui va alimenter une bonne partie du film. En soi, le film pourra peut-être paraître classique dans sa direction narrative, mais il en ressort une solidité et surtout une efficacité du drame qui fonctionne pleinement. Le poids de cet événement va influencer la fragilité émotionnelle d’un protagoniste vu par certains comme lâche car n’ayant pas accompli sa mission mais aussi de la perception d’un spectateur en attente de Godzilla.

Le contexte historique va dans le sens d’une appréhension permanente, les événements ayant clos la Seconde Guerre Mondiale accentuant la friabilité d’un pays scindé par les tragédies et les impositions à un héroïsme suicidaire. Le fond en filigrane va justement appuyer ce besoin de vivre comme la véritable victoire en soi, celle de se battre pour la survie plutôt que d’accepter un sacrifice facile, vain et menant au désarroi derrière soi. Cela peut paraître simpliste en apparence mais confère une douce lumière à un long-métrage n’hésitant pas à virer vers l’Enfer, notamment lors d’une attaque urbaine de Godzilla. Là, un plan appuie sa nature monstrueuse et dévastatrice tandis que les décombres fument encore de ses actions.

Takashi Yamazaki parvient alors à conférer une ampleur dans ses moments de démesure, renvoyant toujours à un jeu d’échelle qui renforce le danger de l’instant, même dans une séquence maritime. Ainsi, la poursuite par Godzilla d’un petit bateau en bois où se trouve le héros renvoie à une tension absolue par la grandeur, tout en rappelant l’absence de répit avec notre monstre. Les instants de bonheur ne sont qu’éphémères dans le long-métrage, appelant d’autant plus à leur nécessité dans le parcours de notre héros. Les deux dernières images accentuent encore ce sentiment de cycle qui ne s’interrompra jamais en ce sens, tout en liant une dernière fois l’intimité du drame et la taille du danger. C’était quelque chose qui apportait un peu d’émotion au très sympathique « Lupin III : The First » du même réalisateur, en plus d’une visibilité exemplaire dans la mise en scène de l’action qui n’en diminue jamais son impact.

La découverte même du film appuyait donc l’intérêt de sa (re)découverte avec cette sortie en édition physique mais son édition collector a d’autres arguments à faire valoir, notamment la présence du long-métrage dans sa version en noir et blanc. Loin d’un simple outil marketing renvoyant au film original d’Ishirô Honda, ce choix de photographie accentue les partis pris visuels jusque dans les moments de dévastation plus impactants encore. Le Blu-Ray bonus et le livret sont de sympathiques ajouts dans un écrin à la hauteur des espérances.

En effet, « Godzilla Minus One » méritait une édition de qualité au vu de sa réussite artistique et c’est le cas avec cette sortie physique chez AllTheAnime, à l’image de cette version collector qui devrait ravir tous ses fans. Mais même dans un autre format, le film de Takashi Yamazaki est un exemple de bon blockbuster qui sait lier humain et monstrueux avec une ampleur aussi exemplaire que marquante. Il n’y a donc plus d’excuse pour faire découvrir ce film ou le revoir  pour fêter une année imprimée par la grandeur intemporelle de Godzilla…

Résumé : Le Japon se remet à grand peine de la Seconde Guerre mondiale qu’un péril gigantesque émerge au large de Tokyo. Koichi, un kamikaze déserteur traumatisé par sa première confrontation avec Godzilla, voit là l’occasion de racheter sa conduite pendant la guerre.