Critique : Certaines personnes aiment à croire que le cinéma n’a rien de politique. Il est impossible pourtant de nier sa nature clairement marquée dans sa direction, comme on a pu se plaire à le rappeler. Ici, le nouveau film de Tarik Saleh (derrière les déjà très bons « Le Caire Confidentiel » et « La conspiration du Caire ») conforte cette importance du rapport à l’image politisée avec ce nouveau long-métrage qui oppose des imageries d’idoles, reliant pleinement le pouvoir cinématographique à celui de la politique par ses questions d’icone. Fares Fares s’avère comme toujours idéal dans un rôle principal sur la verge de la chute, celle de l’égo d’acteur obligé de constater la réalité de son environnement au-delà de son propre confort au vu des impositions auxquelles il ne peut échapper.

Tarik Saleh joue ainsi intelligemment des tons, virant parfois à la comédie de cinéma avec une finesse qui permet de mieux marquer ses amorces avec une certaine cruauté. Ainsi, les différentes bascules de la narration assument totalement la violence du propos, notamment dans des mensonges d’état ou l’envie de réécrire constamment les événements, installant la fiction comme outil de propagande même quand elle s’oriente dans un cadre de réel. Et si le rythme peut faire fluctuer le récit vers des cours peu flatteurs, c’est justement pour mieux interroger sa narration et assumer un manque de facilité au vu des circonstances sociales peu propices à mener correctement sa boussole morale.

« Les aigles de la république » n’est donc pas un film aisé et peut logiquement désarçonner par ses multiples contours. C’est justement pour ces raisons que l’on vous recommande sa découverte, d’autant plus quand une piqure de rappel s’avère nécessaire pour souligner la nature mouvante de l’image dans une période où tout doit être contrôlé, cadré et dirigé dans un sens comme dans l’autre. Le cinéma est politique, rappelons-le, et c’est un outil puissant qui ne peut être dévalué, comme le souligne intelligemment Tarik Saleh avec son dernier titre.

Résumé : George Fahmy, l’acteur le plus adulé d’Egypte, est contraint par les autorités du pays d’incarner le président Sissi dans un film à la gloire du leader. Il se retrouve ainsi plongé dans le cercle étroit du pouvoir. Comme un papillon de nuit attiré par la lumière, il entame une liaison avec la mystérieuse épouse du général qui supervise le film.