Critique : Dire que le film de Rose Glass était attendu serait sous-estimer l’intérêt généré par le long-métrage depuis ses premières images. Il faut bien admettre que les bons retours entourant le précédent essai de la réalisatrice, « Sainte Maud », couplés au charisme déjà éclatant de Kristen Stewart et Katy O’Brian, ne pouvait susciter qu’une forte curiosité. Pouvoir découvrir « Love Lies Bleeding » au cinéma s’avère alors un réel plaisir tant il s’y développe une réécriture des codes du film noir dans un genre assumant un côté poisseux mais surtout organique qui sied à ses réflexions.

Limiter le film à un « Thelma et Louise » dans le milieu culturiste serait passer à côté de l’un des points d’intérêt du long-métrage : son renfermement territorial. Qu’importe si un personnage se rend à un moment à Las Vegas, elle se retrouve violemment ramenée dans cette petite ville miteuse où nos héroïnes sont écrasées de près et de loin par l’influence d’un patriarche violent. Ed Harris s’y montre une nouvelle fois inspiré, à l’image du casting en général. Dave Franco incarne une violence beauf repoussante, Kristen Stewart trouve une nouvelle prestation de qualité dans son éloignement des gens (mis à part avec Jackie) mais c’est Katy O’Brian qui se révèle au mieux, représentation d’une envie d’accomplissement physique qui donnera au film ses meilleurs contours. C’est d’ailleurs ce ton organique qui convient le mieux au long-métrage, disposant d’aspérités visuelles intéressantes mais par moments trop froides en comparaison avec la chaleur moite de ses meilleurs instants (comme son générique de fin).

Peut-être pas tout à fait à la hauteur de sa réputation par certains points (la narration ronronnant à un moment), « Love Lies Bleeding » s’avère néanmoins recommandable par ses sursauts graphiques assumant une étrangeté exaltante. On aurait préféré que le long-métrage soit constamment à ce niveau et pousse même plus loin sa culture du corps mais il n’en reste pas moins un film singulier qui mérite qu’on l’aborde aussi bien pour ses qualités que pour certaines polémiques, ne serait-ce que par la relation sur un fil par moments peu confortable entre ses héroïnes. Cette proposition de polar noir et moite a en tout cas des arguments pour devenir un titre fortement apprécié dans le milieu et on ne serait pas surpris de cela.

Résumé : Lou, gérante solitaire d’une salle de sport, tombe éperdument amoureuse de Jackie, une culturiste ambitieuse. Leur relation passionnée et explosive va les entraîner malgré elles dans une spirale de violence.