Je veux faire écho ici d’une découverte surprenante. J’en suis encore tout étonné. Pas forcément fan de vieux films, j’ai tenté la plongée dans le vieux cinéma français. Paliers après paliers, je suis allé de surprises en surprises, décidé à poursuivre plus profondément jusqu’à en revenir fasciné. Avec une évidence dont j’en suis le premier étonné: les vieux films français ne sont (presque) pas datés, ils sont au contraire plein de vie et de joie, drôles et émouvants. Vous pensiez que Louis Jouvet et Arletty étaient des vestiges préhistoriques? Détrompez vous, ils sont d’une surprenante actualité!

Knock 2Tout a débuté par une discussion sur la page Facebook de Culturaddict. Une abonnée m’indique que les films avec Louis Jouvet sont incomparablement plus comiques que les bouillies indigestes actuelles (pas besoin de les citer, on parle bel et bien de Camping ou Débarquement immédiat). L’esprit curieux, je me décide à lister les films à regarder en priorité. Knock (1951), Entrée des Artistes (1938), Drôle de drame (1937), Hôtel du Nord (1938) Quai des Orfèvres (1947) sortent du lot lorsque je commence quelques recherche sur le net. Je les regarde les uns après les autres et l’évidence se fait jour. Les films sont drôles, les acteurs sont comiques, les intrigues sont finement ciselées. Certes, le Noir & Blanc rappelle qu’on vogue en temps anciens mais hormis ce léger détail, les films se regardent avec plaisir!

Hotel du nordQuelques acteurs récurrents donnent à ces films un souffle épique inattendu. Louis Jouvet en impose par sa stature de commandeur pince sans rires. En inspecteur, prof de théâtre ou curé, il ne se départit jamais de son regard fixe et perçant. Les mots roulent dans sa bouche, que ce soit du Racine ou la recette de la tarte aux pommes. A ses côtés, une galerie d’acteurs apparait de manière récurrente: Bernard Blier, Arletty, Pierre Brasseur, Charles Dullin. Des acteurs qui ne diront rien aux plus jeunes, et pourtant… Un réalisateur règne en maitre sur cette collection de films, c’est Marcel Carné, peut être un des plus grands réalisateurs de ces temps anciens. Une fois le réalisateur identifié, je me décide à regarder ses 2 chef-d’oeuvres.

Les enfants du paradisLes Enfants du Paradis (1945) est son film totem. Toujours classé sur le podium des plus grands films français de l’histoire, et on comprend pourquoi. Cette histoire d’amour déchirante entre un mime et une belle convoitée de tous donne lieu à un drame foisonnant et picaresque. Jean-Louis Barrault et Arletty sont juste envoutants dans cette fresque de 3 heures découpée en deux. La première partie Boulevard du crime place les éléments de l’intrigue avec de somptueuses pièces de théâtre filmées. La seconde partie L’homme blanc montre l’impossibilité de cet amour trop pur pour un monde trop noir. De quoi rester scotché à l’écran pendant 3 heures avec ces péripéties et cet incomparable souffle lyrique.

Les visiteurs du soirJe décide de creuser un peu plus avec Les Visiteurs du Soir (1942). Arletty perd son accent titi parisien pour une prononciation plus châtiée, celle du Moyen-Âge des contes et fééries. Preuve que c’est avant tout une actrice d’exception. Deux ménestrels s’invitent à la fête d’un seigneur pour envouter les futurs mariés. Quand le diable se mêle à la partie, le drame n’est pas loin. Le film suit un rythme lent et contenu, tout en concision. Le film fascine par cette évocation d’un temps entre la fable et le conte cruel. Pas le scénario le plus actuel, mais ça vaut bien Les Visiteurs. Bien mieux. Les acteurs semblent tout droit sortis d’une pièce de théâtre, c’est un régal.

 

Drôle de drameEncore maintenant, je n’en reviens toujours pas. Il ne faut pas croire ceux qui disent que seul le cinéma américain vaut le coup. Pourtant grand fan de ce genre dominant aux nombreuses pépites, il faut ouvrir ses horizons. Après la découverte d’Ingmar Bergman et d’Akira Kurosawa, je place Marcel Carné dans mon panthéon personnel du cinéma universel.