Critique : Il est désormais évident que chaque film de Luca Guadagnino devient un petit événement tant le metteur en scène a su cumuler un rythme quasi annuel avec des propositions marquées dans leurs esthétiques et thématiques, à l’instar d’un Quentin Dupieux bien moins absurde. « Challengers » avait donc de quoi susciter la curiosité, avec un trio principal assez remarqué et un ancrage dans le film de sport assumant une physicalité qui sied au metteur en scène, en prolongation de la danse dans « Suspiria » ou du cannibalisme de « Bones and all ». C’est d’ailleurs dans cet aspect que le film fonctionne le mieux, se défiant de trouver ce sentiment de grâce immatériel dans la physicalité du sport avec un rythme hautement prenant.
La narration décide ainsi de mêler les temporalités, partant principalement d’un match pour mieux en éclater ses instants et mieux suivre son triangle amoureux. Le film concilie ainsi son approche du sport avec un érotisme induit, même si l’on pourrait regretter que celui-ci ne soit pas plus assumé dans ses visuels. En même temps, on peut argumenter que la question de la transcendance par le sport incite à cette retenue afin de mieux exploser dans ses dix dernières minutes, brisant tous les points de vue pour se concentrer sur cette forme d’orgasme particulièrement jouissif et tape-à-l’œil. Le long-métrage parvient à y détonner ses attentes, bien aidé par la mise en scène de Guadagnino mais également la présence de Mike Faist, Josh O’Connor et Zendaya, exprimant à leur manière une insatisfaction physique et émotionnelle où le tennis devient vecteur d’expression totale. En finissant par s’affranchir de toute limite, le film impose une extase visuelle qui ne pourra que diviser.
C’est justement pour cela que « Challengers » mérite le coup d’œil, notamment avec cette sortie en édition physique, afin de mieux redécouvrir sa manière de lier drama sportif et intensité émotionnelle ne demandant qu’à s’exprimer, ici par le biais du tennis. Luca Guadagnino appuie la nature cinématographique du sport tout en s’amusant de son trio principal au sein d’une intrigue rebondissant entre temps et contretemps de vie. Pas étonnant dès lors que le long-métrage se soit rapidement trouvé un public investi tant il a tout pour frapper juste, dans un geste de cinéma au revers particulièrement bien mené…
Résumé : Challengers met en scène Zendaya dans le rôle de Tashi Duncan, une ancienne prodige du tennis devenue entraîneuse et mariée à un champion en perte de vitesse. La stratégie de Tashi pour la rédemption de son mari prend une tournure surprenante lorsqu’il doit affronter son ancien meilleur ami, qui est aussi l’ancien petit ami de Tashi. Alors que leur passé et leur présent s’entrechoquent et que les tensions montent, Tashi doit se demander ce qu’il lui en coûtera pour gagner.