Critique : Pas besoin d’être historien pour comprendre le fossé social entre les normes des États-Unis et celles du Royaume-Uni, encore plus dans une période comme les années 60 où la quête de l’imagerie nationale influe fortement la perception. C’est de ce terreau assez riche que part la sympathique comédie du jour, « Ailleurs, l’herbe est plus verte », réalisée par Stanley Donen et disponible depuis quelques temps en édition physique chez Rimini.

Dès la chanson introductive se moquant des façades britanniques dissimulant une situation financière compliquée, le long-métrage amène un enjeu économique et un rapport d’impression extérieure qui vont alimenter les enjeux du film. Le regard sur un couple enfermé dans la routine et la possibilité d’échappatoire par un riche amant américain se cristallise aussi bien dans un long dialogue entre Deborah Kerr et Robert Mitchum que par la façon de filmer « l’absence publique » du couple illégitime pour mieux les retrouver dans leur intimité. Il y a un amusement non feint dans la façon dont Stanley Donen capte cet aspect, un ludisme qui va se retrouver également dans la mise en scène.

Ainsi, la réalisation ne s’enferme pas dans la théâtralité du texte d’origine mais joue de son décorum, en particulier de la propriété des Rhevyll qui sert moins de foyer que de musée permanent où les locataires du moment ne font que déambuler. Cela apporte quelques idées de réalisation dans le traitement de l’apparat, bien aidé en ce sens par la photographie extrêmement colorée. On soulignera en ce sens la qualité de l’édition fournie par Rimini, accompagnée de suppléments comme un entretien avec le spécialiste de l’Histoire du cinéma Florent Fourcard ou encore l’échange sur Deborah Kerr avec Olivier Murdry.

Film aussi drôle que faussement léger, « Ailleurs, l’herbe est plus verte » se fait un beau portrait du fossé social et marital entre Royaume-Uni et États-Unis. Gentiment piquant mais réellement amusant, c’est un long-métrage au charme certain, bien porté que ce soit par sa mise en scène solide ou son casting impeccable à souhait.

Résumé : Pour joindre les « deux bouts », le très fair-play lord Rhevyll autorise la visite payante de sa propriété. C’est ainsi qu’un touriste américain fera la connaissance de la très épouse et très mère de famille lady Rhevyll qui n’a pas été immunisée contre les surprises des sens.