Critique : L’une des plus grandes forces de la fiction est de permettre à toute personne de se mettre dans la peau d’une autre pendant une certaine durée. On ne compte plus les témoignages d’individus revenant sur diverses œuvres qui leur ont permis de découvrir qui ils sont tout en pouvant également remettre en question leur vision en adoptant le regard d’autres personnalités. Ainsi, l’approche de « Transatlantique », premier roman de Camille Corcéjoli, permet de mieux passer dans un récit de transition de genre avec un aspect autobiographique qui apporte une grande empathie à l’ouvrage.
Le style varie entre quelques élans poétiques de témoignages directs et des chapitres assez courts, avec un phrasé allant dans une forme d’instantané. Difficile de ne pas développer une proximité sentimentale forte avec Alex dans son aventure, tout en se confrontant aux violences transphobes et à la douleur qui découle de celles-ci, même dans des expressions pouvant paraître « anodines » pour celles et ceux qui les partagent. La dynamique narrative s’avère alors soutenue et fortement touchante, avec une plume qui confère au tout une énergie qui nous transporte facilement.
« Transatlantique » s’inscrit alors comme un beau récit de transition, un premier roman à la verve vibrante et dont l’intimité nous retourne pleinement. Le témoignage vit avec une émotion non feinte et parvient à faire ce que la fiction fait de mieux : nous partager totalement une expérience avec esprit et poésie directe. On ne peut que souhaiter à Camille Corcéjoli que son premier ouvrage connaisse un grand succès public tant il serait mérité de voir un roman aussi réussi conquérir une large audience.
Résumé : Alex embarque pour les États-Unis avec Louise, Djo et Harli – ses ami·es de toujours –, dans un road trip aussi gai qu’émouvant et mouvementé. Un voyage durant lequel Alex va se défaire de ses seins.
L’histoire de la transition d’Alex est à l’image des parcours de vie, rarement linéaires et naturellement plus complexes qu’il n’y paraît. La double narration dynamique à l’œuvre au sein de Transatlantique nous invite ainsi à partager ce qui fera le quotidien du voyage d’Alex et de ses ami·es, à travers des dialogues particulièrement enlevés et où la joie l’emporte, tout en nous propulsant dans des scènes du passé qui peuvent être à la fois drôles et inattendues, mais aussi à l’image de la réalité de la violence transphobe.