Critique : Les sacrifices imposés par l’art de la danse sont trop nombreux et ont déjà été assez répétés pour tout citer ici, ce qui n’empêche pas de rappeler globalement l’investissement intense qu’impose le milieu. Il suffit alors de rajouter un rapport politique pour compliquer encore les choses, à l’instar de l’histoire vraie de Joy Womack. Cette danseuse américaine avait fait sensation en intégrant la légendaire Académie de ballet du Bolchoï avant d’en révéler ses plus sombres aspects. Il y avait donc matière à faire un film à ce sujet, ce que confirme la sortie de ce « Joika » dans les salles de cinéma belges, sachant que la sortie française a été suspicieusement très confidentielle malgré l’appel de pareil projet.

Ainsi, le long-métrage de James Napier Robertson parvient à amener graduellement le mal-être physique et psychologique de Joy, constamment sous-estimée dans un milieu russe excluant. Les menaces sont constantes, entre souliers piégés et entraînements intenses filmés de façon proche pour mieux retranscrire le malaise du personnage principal. L’implication de Talia Ryder n’est pas à diminuer, surtout en opposition à la froideur logique de Diane Kruger dans son rôle. On peut aussi souligner le côté anti spectaculaire qui sied au récit et une photographie évoluant entre le surplus factice de lieux de représentation à l’ambiance terne et déshumanisée des répétitions. Il manque néanmoins un petit quelque chose pour faire de ce bon film un indispensable dans le domaine.

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Cela n’empêche pas d’apprécier ce « Joika » dans sa proposition cinématographique, mettant en avant le réel de l’angoisse en ne le sacrifiant pas dans des enjeux plus grands qui auraient pu détruire sa véracité. Avec sa critique d’un milieu de spectacle détruisant sous prétexte d’une mise en avant d’un absolu dans l’art, le film parvient à atteindre ses objectifs et aurait mérité une plus grande visibilité par ses nombreuses qualités. On espérera que la Belgique accordera alors au titre de James Napier Robertson l’accueil qu’il mérite.

Résumé : Joy Womack, une dan­seuse de bal­let de 15 ans, quitte sa mai­son fami­liale du Texas et s’en­vole pour Mos­cou après avoir mar­qué l’his­toire en étant accep­tée à l’A­ca­dé­mie de bal­let du Bol­choï. Son rêve est de sor­tir diplô­mée de l’A­ca­dé­mie et deve­nir dan­seuse étoile dans la com­pa­gnie d’é­lite du Bol­choï. Mais la concur­rence est rude et sa légen­daire ensei­gnante, Tatiya­na Vol­ko­va, exige une impli­ca­tion colos­sale de la part de ses élèves. Afin de pour­suivre son rêve, Joy devra faire des sacri­fices de plus en plus extrêmes, quitte à se mettre en danger…