Critique : Faut-il rappeler qui est Orson Welles ? Même sans avoir vu son « Citizen Kane » (qui reste un chef d’œuvre cinématographique que vous vous devez de regarder), le réalisateur et acteur a su marquer de manière indélébile l’histoire du cinéma. Pourtant, alors que l’on parle de compléter un de ses films inachevés avec des images générées en intelligence artificielle (décision aussi bête qu’enrageante), on parle moins des personnes qui l’ont entouré et aidé à devenir la légende telle qu’on le connaît. Les entretiens au sein de « Leur Orson Welles » permet alors de réparer cet oubli tout en enrichissant notre rapport avec ce monstre du septième art.

Jean-Pierre Berthomé et François Thomas réunissent ici de nombreux échanges avec diverses personnalités afin de révéler l’homme derrière la légende, tout en permettant aux spots d’être projetés un instant sur ces collaborateurs moins renommés. Il s’y développe des descriptions passionnantes, des échanges qui, à l’instar de la quête pour Rosebud, se rapprochent au plus près de l’artiste afin de mieux en déceler son rapport de travail et ses relations sociales. C’est cette humanité qui ressort essentiellement au fur et à mesure de notre lecture, avec des entretiens fournis et vivants à souhait.

« Leur Orson Welles » s’avère in fine un portrait de créateur qui a osé constamment, jouant de l’affrontement pour l’art tout en nouant des relations riches par ses nombreux projets. Au sein d’entretiens passionnants, Jean-Pierre Berthomé et François Thomas développent les visions mais partagent aussi des êtres en tous genres, ombres dans la gloire parfois mais personnalités essentielles qui rappellent à la collectivité de la création. C’est clairement du bel ouvrage cinéphile que nous proposent Les impressions nouvelles et on serait des plus idiots de ne pas vous le recommander, ne serait-ce par ce que ce livre parvient à dire de l’humain derrière l’artiste.

Résumé : Orson Welles a entretenu des relations très différentes avec ses collaborateurs au fil de sa carrière cinématographique. À Hollywood de 1939 à 1947, il a principalement bénéficié de l’apport de professionnels expérimentés, dont la plupart étaient prêts à mettre leur savoir-faire au service d’expériences nouvelles, au sein d’un grand studio pour Citizen KaneLa Splendeur des Amberson et l’inachevé It’s All True, puis de sociétés plus modestes pour Le CriminelLa Dame de Shanghai et Macbeth. En Europe où il a passé l’essentiel de son temps de 1948 à 1970, puis aussi, après quelques années de va-et-vient, aux États-Unis où il s’est réinstallé de 1974 à sa mort en 1985, Welles a eu tendance à s’entourer de techniciens jeunes, parfois novices ou presque, qu’il formerait et qui le suivraient dans des aventures très peu cadrées logistiquement.

Jean-Pierre Berthomé et François Thomas ont rencontré de nombreux collaborateurs de Welles pour en savoir plus sur leur relation de travail avec lui, sur leur apport propre, sur le style des œuvres auxquelles ils ont participé. Sont rassemblés dans ce livre douze de ces entretiens enregistrés entre 1982 et 2005 en France, en Allemagne, en Angleterre ou aux États-Unis. Certains abordent également les productions théâtrales et radiophoniques de Welles, aussi inventives que ses films.