La science-fiction a souvent servi aux artistes pour critiquer la société actuelle par le biais d’une lecture futuriste de notre monde. Ainsi, nombreuses sont les dystopies qui servent de reflet à un sujet actuel brûlant ou les récits qui cherchent à éveiller le public face aux problèmes d’un pays ou de notre planète en général. Il y a dix ans sortait Les fils de l’homme , film de science-fiction qui prouva malheureusement que certaines actualités peuvent rattraper les créateurs dans le domaine.
Théo habite au Royaume-Uni, dans une société où plus aucun enfant n’est né depuis 18 ans. Et alors que le monde souffre de cette crise de fertilité, Théo se voit contacté par son ex-femme pour protéger une jeune fille enceinte.
Immersion en terrain réaliste
Dès la première scène de son film, Alfonso Cuarón nous happe dans son récit au moyen d’un plan séquence qui terminera dans le chaos. Mais ce plan sera suivi ensuite d’un retour au quotidien normal, comme si les explosions étaient devenues si fréquentes qu’il faut passer dessus comme si de rien n’était. La crise de fertilité qui a frappé le monde a plongé la société dans ce chaos constant qui a conduit le Royaume-Uni dans un repli sur soi qui rend tout immigré en quête de vie meilleure clandestin. Difficile de ne pas faire le lien avec une actualité où les morts de migrants sont légion et où les politiciens jouent de la peur d’autrui pour être élus. Notre taux de natalité est toujours bon mais notre société se rapproche de plus en plus de celle dépeinte par Les fils de l’homme , au point d’hésiter à continuer à ranger ce film dans le domaine de science-fiction.
La mise en scène de Cuarón se veut immersive et a souvent un aspect documentaire et cru. Ainsi, on a régulièrement droit à des plans séquences afin de mieux nous immerger dans l’instant et mieux nous faire ressentir le chaos ambiant (la scène de début, la poursuite en voiture, la fusillade). Mais Cuarón utilise également des références artistiques pour mieux souligner l’aspect chutant de cet univers, que ce soit en les référençant de nom ou par le visuel. C’est également l’occasion de souligner l’importance de l’art pour décrire le monde dans lequel nous vivons (les références sont trop nombreuses pour toutes les retranscrire ici).
Refermement désastreux
La caméra de Cuarón ne dissimule rien des horreurs de cette société et place régulièrement le spectateur à la hauteur des personnes qui souffrent de cette situation. Par cela, il humanise et choque en nous mettant face à une horreur qui est malheureusement quotidienne. Ainsi, le repli identitaire du Royaume-Uni, qui se veut paradisiaque, ne fait que rendre encore plus apocalyptique la situation du pays. C’est ainsi que le salut viendra des terres extérieures, ouvertes à tous. Doit-on y voir la preuve que l’ouverture est un meilleur moyen de subsister que le repli total ?
Les fils de l’homme est donc une œuvre de cinéma renversante, le genre de classique instantané à la force visuelle et narrative marquant le septième art à tout jamais, tout en étant la preuve que le septième art peut encore balancer des œuvres parfaites en tous points. Quant à son message prémonitoire, espérons que la réalité ne rejoigne jamais totalement la fiction, sous peine de finir de manière permanente dans une société déchue…