Le récent film de Clint Eastwood La Mule a l’énorme avantage de remettre le réalisateur devant sa caméra, avec son charisme bien connu et son éternel air bravache, le même depuis la trilogie du dollar des années 60. En adaptant une histoire vraie d’horticulteur appâté par la perspective de gagner beaucoup d’argent en devenant passeur de drogue pour un cartel de drogue, il interprète un personnage visiblement âgé mais décidé à se refaire, pour lui-même et pour sa famille. Car après une vie d’absences continuelles le coupant des évènements familiaux fondamentaux, l’opportunité de redorer son blason est plus forte que les scrupules et la moralité. Le film est touchant, l’acteur est fidèle à lui-même, le divertissement est réussi et si le film ne passera pas forcément à la postérité, il est tout à fait honorable pour une séance ciné plaisir.
Du beau, du bon, du Clint
Le personnage principal Earl Stone a passé une belle vie dédiée à sa passion pour les fleurs, les amis et le bon temps. Seul hic, la famille est trop souvent passée au second plan. Quand l’ère Internet met son business à genou et qu’un ami d’ami lui propose un emploi facile et rémunérateur, aucun doute ne l’étreint. Et quand il découvre que des dealers mexicains le chargent de transporter de la cocaïne sur de grandes distances à travers les Etats-Unis de manière invisible, il conserve son calme sans sourciller et se met à la tâche. Avec une belle rémunération en prime. Au risque de se faire dézinguer, vilipender ou arrêter. Clint Eastwood pose plusieurs passionnantes questions dans ce peut-être film. L’impact des nouvelles technologies sur l’économie et ceux qui sont passés à côté du progrès, la place du boulot dans le microcosme familial et surtout la fragile barrière entre le bien et le mal; Car le personnage principal n’est pas un brigand, il n’a jamais mis un pied hors des sentiers battus mais l’homme est faible quand l’argent afflue à gros billets, la preuve en est une fois de plus faite. Même vieux et fatigué, il est encore temps de prendre du bon temps, le personnage ne s’en prive d’ailleurs pas. Et comme le film évolue petit à petit vers l’inéluctabilité d’un clash entre le héros, ses collègues trafiquants et la police chargée de démanteler le réseau avec Bradley Cooper en tête, le rythme et la tension évoluent lentement jusqu’à happer complètement le spectateur. Certes, le film est diablement américain jusqu’à la caricature, mais il ne manque pas d’être également touchant, stressant, drôle et inquiétant alternativement. Cette Mule fait passer un bon moment, légèrement indolore et inodore mais pas sans maintenir l’intérêt pour un destin d’humain qui aurait pu connaitre le succès dans une autre époque et un autre contexte.
La Mule est un film vraiment réussi, sans vraiment d’ampleur pour se hisser dans les classements cinématographiques, mais qu’importe après tout. Le moment ciné est plus qu’agréable et la note de 3/5 n’est pas usurpée. Vu l’état de fatigue de l’acteur réalisateur, il n’est pas sûr de le revoir devant ou derrière la caméra. L’avenir dira, Clint pourrait bien nous offrir d’encore belles surprises!