Le King revit sous les traits du jeune Austin Butler et la performance est éblouissante. Au bout de 10 minutes, la différence physique passe au second plan derrière la performance physique étourdissante. Les spectateurs s’interrogent sur l’investissement nécessaire pour un tel résultat. Si le fil rouge du film est la relation toxique entre Elvis et son manager le Colonel Parker interprété par un Tom Hanks aussi parfait que d’habitude, la magie opère souvent malgré quelques petites longueurs.
L’âge d’or du Rock
Le film débute alors que le Rock’n’Roll sème l’effroi parmi les adultes et la folie chez les adolescents. La société puritaine et conservatrice de l’époque a vécu l’avènement d’Elvis Presley comme une menace à circonscrire fissa pour ne pas laisser les fondements de l’ordre moral s’écrouler. Mais un manager plus roublard que les autres voit bien qu’il pourra manœuvrer ce jeune étalon à son profit personnel. A force de bonnes paroles, il le met au premier plan sur la scène avant de l’en éloigner pour éviter les foudres de la police devant des déhanchés par trop suggestifs. Après l’éloignement militaire en Allemagne vint la phase hollywoodienne évoquée rapidement dans le film avant le ’68 Comeback Special et la période des concerts perpétuels à Las Vegas. Avec toujours tapis dans l’ombre ce manager pernicieux et vénal, de quoi pousser le King vers le surmenage généralisé, au prix de son couple et de sa santé.
Des classiques éternels
Les plus jeunes pourront découvrir une œuvre monumentale, de quoi rallumer la flamme jamais éteinte de l’artiste solo le plus populaire de l’histoire. Le film débute avec des morceaux mélangés à des rythmes hip hop et R’n’B pour actualiser les vieilles rengaines Rock’n’Roll. Et plus l’histoire avance, moins les morceaux sont réarrangés pour laisser l’esprit original souffler sur les spectateurs. Le moment charnière est certainement le ’68 Comeback Special où la star déchue arrive tout de cuir noir vêtu pour reconquérir sa couronne. Les connaisseurs apprécieront, les plus jeunes auront la tête bouleversée par cette force de caractère qui fait aller le chanteur contre les volontés pécuniaires du manager souhaitant voir le King arborer un pull de Noel ridicule tricoté par les machines Singer (publicité subliminale ?). Le King veut du rock, il défend l’esprit, de quoi aviver l’enthousiasme de la salle. Surtout que le film évoque aussi Fats Domino, BB King, Little Richards, Big Mamma Thornton, le meilleur d’une époque.
Un film qui tient toutes ses promesses
Les tubes sont nombreux, Hound Dog, Jailhouse Rock, That’s alright Mamma, mais aussi un sublime If I can dream, un très émouvant Unchained Melody, la musique est mise en avant dans une narration qui voit l’acteur singer Elvis prenant du poids et s’épuiser avec des concerts sans fin. L’acteur d’abord immaculé comme la jeunesse finit par personnifier un Elvis intoxiqué aux médicaments et obligé de soutenir un rythme de fou pour satisfaire aux obligations contractuelles d’un manager accro au jeu et obligé de rincer son poulain pour ne pas couler. Sans vergogne, le personnage rappelle celui interprété par Tom Hanks dans Cloud Atlas pendant la traversée du Pacifique d’Adam Ewing, le Dr Henry Goose persifleur et flatteur au dehors, mais machiavélique au-dedans. Face à l’innocent Elvis Presley, il n’en fait qu’une bouchée et le poussera à sa perte. La vie est dure pour les idoles des jeunes, pressés comme des citrons et obligés de répondre aux demandes de managers sans scrupules.
Elvis est une très bonne surprise, Baz Luhrmann fait une fois de plus des merveilles après les joyaux Gatsby le magnifique et Romeo + Juliet. Le kitsch est toujours présent, les crossovers temporels aussi, c’est parfois chargé mais ça n’a aucun impact négatif sur un film qui fait revivre la légende Elvis.