L’argument du film est simple, Christophe Honoré adapte Proust au Théâtre Marigny avec une partie de la troupe de la Comédie Française, il est devant et derrière la caméra. Tout ce petit monde apprend que la pièce est annulée, la question est simple, continuer à répéter ou tout arrêter, au risque de sombrer. Le film louvoie entre exercice de style, mise en abime du théâtre et film de potes. C’est plein de bons sentiments et les comédiens sont bons, ils jouent le jeu à la perfection, c’est du grand art.

Le théâtre en majesté

Plus de 2h avec Proust, ce pourrait être long, certains l’adorent, d’autres évitent soigneusement ses longues digressions et son style par trop ampoulé. Mais le film ne place pas le curseur spécifiquement sur lui, il est plus un prétexte qu’un objectif en soi. L’intrigue – si on peut dire – montre le jeu de scène des comédiens et l’envers du décor, les petites joies et les grandes peines, la complicité entre les comédiens une fois le rideau tiré, les piques et les coups de cœur. Ce pourrait être uniquement un film de potes s’il ne s’agissait pas des comédiens de la prestigieuse compagnie du français. Et ils sont bons, attachants, agaçants, profondément humains en même temps que complètements comédiens. Ils ne sont pas eux devant la caméra mais donnent parfaitement l’impression de ne pas jouer. Le texte défile bon an mal an, les apartés se suivent, les coups de pompe succèdent aux bisbilles. Si les répétitions ont tout du sérieux attendu de leur part, le film montre surtout les coulisses, les rapports humains, le grands amours et les petites colères, chacun semble se dévoiler sous l’œil amusé et complice du réalisateur metteur en scène. Lui-même se dévoile sciemment avec des clins d’œil à sa vie réelle. Le résultat a tout du jeu sérieux et surtout ça fonctionne. La connivence est constante et quel bonheur de voir Laurent Laffitte, Dominique Blanc ou Sébastien Pouderoux sans fard ni faux semblants. Le regard de la caméra montre ce que chacun cache soigneusement aux autres pour des révélations pas si hasardeuses que ça. Tout l’art de Christophe Honoré est de faire entrer dans un univers habituellement fermé aux yeux indiscrets, avec délicatesse et bienveillance. Mais le monde est clos et vit presque en autarcie, peu ou pas de contacts avec l’extérieur, il faut une sortie du théâtre à la fin du film pour voir la joyeuse troupe se frotter à la société française moderne, sa population jeune et bruyante croisée place de la concorde avant que de se rendre Place Vendôme pour se claquemurer dans une chambre du Ritz, encore en autarcie. La plongée dans le monde du théâtre se veut un tantinet coupée du réel, volontairement ou pas, les détails du monde du dehors sont quelque peu absents.

Guermantes est une parenthèse enchantée dans le monde du cinéma français. Le film donne envie de prendre sa place pour le prochain spectacle de la Comédie Française tant l’art des comédiens devenus acteurs est à son sommet.

Synopsis:
Paris, été 2020. Une troupe répète une pièce d’après Marcel Proust. Quand on lui annonce soudain que le spectacle est annulé, elle choisit de continuer à jouer malgré tout, pour la beauté, la douceur et le plaisir de rester ensemble.