Critique : Doit-on rappeler encore une fois l’importance politique d’une œuvre cinématographique, même quand celle-ci prétend être dénuée d’orientation idéologique ? Sans doute pas. Néanmoins, quand on est confronté au documentaire d’Abdallah Al-Khatib , il nous paraît impossible de ne pas réagir face à la situation à laquelle on assiste ici. Cette réalité qui prend vie devant nous, c’est le quotidien de ce quartier de Yarmouk qui se retrouve à vivre dans le chaos et la misère. Pourtant, loin du misérabilisme dans lequel auraient pu plonger certains, Abdallah Al-Khatib pousse un cri, aussi bien triste que de rage, dans cet objet aux images aussi simples que marquantes.

C’est autant un récit de vie que de (futurs) morts qui se dessine ici, notamment par ce premier plan où une rue fréquentée laisse la place à un vide quasi cauchemardesque, transformant la foule du passé comme des fantômes déjà effacés de l’histoire. Par un geste de montage aussi simple, Abdallah Al-Khatib nous oblige à regarder cette cruauté de l’inaction, du malheur dans lequel les habitants de ce quartier doivent survivre dans des circonstances déshumanisantes. Il laisse d’ailleurs souvent les gens parler, mieux raconter ce qui est devenu leur norme de vie, dans un geste de réappropriation de vie qu’on leur refuse d’habitude. Par cette prise de parole, c’est un courage discret mais puissant par cette non apparence qui s’illustre tout au long de cette heure et demie de métrage.

Documentaire coup de poing, « Little Palestine » ne peut laisser insensible par ce qu’il véhicule. C’est un film dur et poignant, témoignage d’une réalité qui semble ne pouvoir s’incarner dans notre esprit mais qui s’avère pourtant symbolique de l’existence de nombreuses personnes. Rappelant la puissance de l’image et imposant l’incarnation d’une passivité politique, le documentaire d’Abdallah Al-Khatib impose un regard de l’intérieur de ces destinées, quitte à déranger par instants par l’inconfort de cette plongée totale dans la vie de ces victimes collatérales de la guerre, toujours oubliées mais faisant tout pour subsister, héros et héroïnes de la violence du monde.

Résumé : Suite à la révolution syrienne, le régime de Bachar Al-Assad assiège le quartier de Yarmouk (banlieue de Damas en Syrie), plus grand camp de réfugiés palestiniens au monde. Yarmouk se retrouve alors isolé et le réalisateur témoigne des privations quotidiennes, tout en rendant hommage au courage des enfants et des habitants du quartier.