Une atmosphère neo-noir aux accents de David Lynch

Love Lies Bleeding cumule les références cinématographiques et culturelles. La musique, interprétée aux synthés et signée Clint Mansell (ancien membre du groupe de post-punk Pop Will Eat Itself), rappelle fortement les partitions de John Carpenter (le film se déroulant en 1989, il fallait bien un hommage, ça va sans dire).

Quant à l’atmosphère, on sent que Rose Glass a bien révisé son David Lynch. Les plans de la route de nuit éclairée par les phares du pick-up de Lou évoquent explicitement Lost Highway, la liaison lesbienne entre Lou et Jackie n’est pas sans rappeler celle entre Naomi Watts et Laura Harring dans Mulholland Drive et le côté érotique et les balades en voiture emprunte même légèrement à Blue Velvet et surtout Sailor et Lula.

Le décor de banlieue aride du Sud-Ouest américain évoque aussi Mulholland Drive.

L’esthétisation du corps et des muscles, entre érotisme et body horror

Outre David Lynch, Rose Glass en appelle aussi à Paul Verhoeven et David Cronenberg. Le sexe et l’érotisme du film, en plus des deux films de Lynch que j’ai cités plus haut, semblent trouver leurs influences dans Basic Instinct et Crash.

Lors de la première scène de sexe du film, Jackie est excitée lorsque Lou palpe ses biceps, et Lou semble être excitée par la musculature de Jackie. Je vous avoue que c’est difficile de ne pas être gênée par la description de contenu sexuel.

La séquence d’ouverture du film se déroule directement dans la salle de gym de Lou, et dans cette séquence, ce sont les muscles et certaines parties du corps humain qui sont mis en exergue, avec plusieurs gros plans sur des muscles se contractant et des torses perlés de sueur.

Un des enjeux principaux du film est l’ambition de Jackie, à savoir le concours de bodybuilding à Las Vegas. Lou lui fournit des sortes de stéroïdes plus proches du sérum du super-soldat et du venom de Bane que des stéroïdes de Lance Armstrong et John McEnroe. Jackie voit se renforcer et ses biscoteaux et son… son agressivité. En tout cas, elle peine à contrôler sa violence et sa conscience, c’est comme ça qu’elle tabasse J.J. (Dave Franco avec un mulet!!!) à mort et, je suppose, qu’elle se laisse influencer par le père de Lou au point de tuer Daisy. Le renforcement des muscles de Jackie sont mis bien en évidence avec des gros plans, les muscles se gonflent comme ceux de Bane dans les comics Batman: Knightfall.

On croirait presque qu’ils vont exploser, comme le chasseur de primes Durge dans le dessin animé de Genndy Tartakovsky Star Wars: The Clone Wars (qui gonfle comme Tetsuo dans Akira) et explose.

Ce serait trash, non?

Faire du body horror avec de la muscu, c’est une super idée! Ouais, si au moins le film n’avait pas trouvé comme point d’orgue Jackie qui devient géante comme dans L’Attaque de la femme de 50 pieds!

Qu’est-ce que c’est que ça?! Pourquoi Jackie grandit avec les muscles qui gonflent et les fringues qui se déchirent comme si elle était Hulk? Je veux bien que le film baigne dans une ambiance étrange et lancinante, mais les évènements surnaturels sont censé être des hallucinations (Jackie n’a pas réellement recraché Lou dans le désert, je rappelle qu’elle a dégobillé devant le jury à Las Vegas)! Qu’est-ce que ça fout là tel quel?!

Keskecé que ces personnages et cette intrigue?

Le personnage qui semble avoir été le plus négligé est cette pauvre Beth (Jena Malone), la sœur de Lou.

La confrontation de Beth avec Lou à la fin, un pur quiproquo dont même Rose Glass ne doit probablement pas avoir conscience, n’a ni queue ni tête. Comment peut-elle savoir que sa sœur est impliquée? Pourquoi la croit-elle coupable? Pourquoi Lou ne se défend-elle pas, pourquoi ne remet-elle pas les points sur les i avec Beth? Il n’y a rien qui va!

J.J. ne sert à rien, si ce n’est être supposément celui qui a tabassé sa femme. Pourtant, un médecin apprend à Lou qu’il a déposé plainte. Est-ce qu’il l’a vraiment brutalisée? Eh ben, même si tout porte à croire qu’il l’a bel et bien fait (Dans ce cas, pourquoi aurait-il déposé plainte?), on ne saura jamais le fin mot de l’histoire!

Le personnage de Lou Sr. a été bien bâclé, lui aussi:

Ed Harris, aussi classe qu’inutile

Le personnage de Lou Cranston Sr, le père de Beth et Lou, joué par l’excellent Ed Harris, ne sert pas à grand chose. On ne sait rien de lui, on comprend dès le début qu’il sera le méchant, pourtant son passif n’est révélé qu’à la fin, rushé comme un malpropre!

Il n’a même que peu voire pas du tout d’incidence sur les enjeux! À quoi qu’il sert?

La fin: Mais POURQUOI?

Pourquoi Lou achève Daisy en l’étranglant avant de l’abandonner dans le désert? Certes, elle a besoin d’en finir avec son ex pour Katy, mais est-ce que c’était nécessaire de la buter, sachant qu’elle refuse de se salir les mains? C’était pas plus simple de la laisser pour morte dans le désert? Avec un trou de balle (littéralement) dans la tronche, difficile de survivre au milieu de nulle part.

Et puis merde, POURQUOI?!

Rien ne va! Ce film ne va nulle part!

Conclusion

Malgré des références assumées qui font sourire et une mise en scène originale, Love Lies Bleeding s’emmêle les pinceaux avec une intrigue mal ficelée et des personnages soit bizarrement construits soit inutiles. Dommage.

Synopsis

Lou (Kristen Stewart), gérante d’une salle de gym, fait la rencontre de Jackie (Katy O’Brian), une culturiste qui s’entraîne pour une compétition de bodybuilding à Las Vegas. Entre les deux femmes naît une idylle qui sera parasitée par l’ex de Lou, Daisy (Anna Baryshnikov), et son père, Lou Sr. (Ed Harris avec des cheveux longs et une calvasse!!!).