Pour les rares personnes qui n’ont pas encore eu la joie de découvrir ce film d’anticipation glaçant et fascinant, un petit rappel. Dans un futur proche, l’humanité ne peut plus faire d’enfant, hypothéquant d’autant son avenir. Le Royaume-Uni choisit une manière étrange de faire face à la situation, pourchassant sans relâche les clandestins pour les parquer dans un camp avant une probable expulsion. Théo Faron (Clive Owen) mène une existence sans relief dans le brouhaha ambiant. Il est pourtant contacté par son ex-femme pour s’occuper d’une personne très spéciale. Il s’agit en effet d’une femme avec la particularité inédite d’être… enceinte.
Un futur apocalytique
Là où beaucoup de films d’anticipation choisissent d’améliorer sensiblement l’avenir, de le fantasme exagérément ou de le transformer en enfer sur terre, Children of men prend le parti d’un réalisme exacerbé, d’autant plus terrifiant qu’il ne permet pas de distinguer le film de la réalité actuelle. Les personnages se baladent dans un Londres presque en tous points similaires à ce qu’on connait de la capitale britannique. Le parti pris est évident: en abrogeant toute frontière temporelle ou physique, le film créée un lien patent entre la fantasmagorie du scénario et notre monde actuel. Et si demain, les femmes ne pouvaient plus enfanter? Comment réagirait-on? On ne parle pas de bombe atomique, de guerre de civilisation ou de descente d’extraterrestres. Juste d’une catastrophe pas impossible du tout, aux effets similaires voire désastreuses sur notre avenir. Car il ne faut pas s’y tromper, la conséquence à moyen terme est rien de moins que la disparition de l’espèce humaine. Et le héros du film personnifie chacun de nous, engoncé dans un travail inepte, une existence sans relief et un lendemain sans saveur. Il lui faut une quête pour se sortir de sa torpeur et donner le meilleur de lui même.
Une métaphore de l’élan vital
En plaçant l’action dans un contexte violent, avec ces groupes terroristes car incapables de réagir raisonnablement au formidable défi qui s’offre à l’espèce humaine, le réalisateur Alfonso Cuaron métaphorise notre situation actuelle. Là où chacun devrait faire tout son possible pour trouver une solution à une vie sans profondeur, l’homme préfére se laisser vivre dans un quotidien absurde et suivre le courant sans se débattre. Sans voir que la fin approche inéluctablement. Les Fils de l’homme grossit le trait et métaphorise la destinée humaine. Le film fait ressortir les traits les plus ineptes, la peur de l’autre, la répression, la privation de liberté, pour bien montrer que ce sont des dangers auxquels nous pourrions tout à fait être confrontés, si ce n’est déjà fait. La quête du héros le fait se dépasser pour mener à bien sa mission, sauver la seule mère de l’humanité de l’anéantissement. Les procédés utilisés par le réalisateur sont à couper le souffle. Plans séquences déjà rentrés dans la légende, utilisation optimale de la musique, atmosphère grisâtre et lugubre, bouts de ficelle pour des effets maximaux. Les Fils de l’homme est un tour de force qui se regarde plusieurs dizaines de fois pour bien en comprendre toutes les arcanes. Pour une empathie immédiate envers ce héros perdu dans une aventure qui le dépasse.
Ni superman ni Batman
Le héros dénué de tout superpouvoir ou de richesse extravagante mène sa quête à bien. Par delà les difficultés et les obstacles. Le film offre une belle leçon de vie et Clive Owen interprète magnifiquement ce héros simplement humain, au parcours douloureux et tout entier tourné vers cette inconnue qu’il sait devoir absolument sauver. Children of Men n’est qu’une suite ininterrompue de scènes mythiques, l’attentat initial dans un café, la balade en voiture au son de King Crimson, l’attaque dans la forêt, la fuite du campement des rebelles… et j’en passe. Il n’y a pas 5 minutes de calme et l’action se déroule tambour battant dans un rythme effréné. Pour un constat qui fait froid dans le dos. L’homme est un loup pour l’homme et le héros ne peut compter que sur lui même pour s’en sortir. Belle leçon de vie.
Si vous n’avez pas encore vu ce film, c’est le moment de vous lancer…