Peintre naif assez peu connu en France, Antonio Ligabue a pourtant marqué l’histoire de l’art avec ses oeuvres intransigeantes. Ce film lui rend hommage en invoquant son existence unique qui le prédestinait plus à la mendicité qu’à la consécration artistique. L’acteur Elio Germano livre une prestation habitée dans ce film à ne pas manquer.

Un destin hors du commun

Le film ne cache rien des tourments de l’homme et de l’artiste Ligabue. Très tôt considéré comme un inadapté à la limite de la débilité, l’enfant puis l’homme s’est façonné tout seul à la découverte de ses aptitudes artistiques. Enfant abandonné, en quête d’amour mais incapable de s’attacher, le jeune Antonio souffrait de rachitisme et d’un goitre, qui entraînèrent une altération de son développement physique et mental. Le film montre son extrême solitude, du à un caractère difficile et une inaptitude scolaire qui le font rejeter de tous ses camarades. En 1919, après avoir agressé sa mère adoptive lors d’une dispute, il est expulsé de Suisse sur plainte. Son arrivée en Italie le voit obligé de se débrouiller pour survivre, il pratique la mendicité et l’aumône. C’est en commençant à peindre qu’il parvient à soulager ses angoisses, atténuer ses obsessions et combler sa solitude. Le film montre le rejet initial jusqu’à la reconnaissance collective de son art. Le début du film mélange d’ailleurs traitement médical et flashbacks qui permettent de mettre en rapport les débuts compliqués et la persistance des difficultés par delà le destin de peintre de l’homme Ligabue, le procédé est très bien utilisé sans jamais perdre le spectateur, une vraie prouesse. Dans ses peintures, les sensations et les sentiments que l’artiste était incapable d’exprimer avec des mots trouvent une expression. L’acteur livre une partition inoubliable avec une transformation physique entre le Daniel Day-Lewis de My Left Foot et le Daniel Auteuil de Jean de Florette dans le rôle d’Hugolin. Le physique disgracieux n’empêche pas la reconnaissance et l’attachement, au risque de l’exploitation lorsqu’il devient de plus en plus riche tout en restant très fragile. De manière surprenant étant donné le sujet assez aride, le film tient en haleine pour suivre les aventures d’un homme avec moins de chances au départ que beaucoup mais qui parvient à se faire un nom parmi d’autres artistes de la même école artistique, comme le Douanier Rousseau ou Séraphine de Senlis.

Les multiples récompenses obtenues par le film sont finalement bien compréhensibles tant le spectateur parvient à s’attacher à un être pourtant assez antipathique mais doué de facultés qui lui ont permis de rentrer dans la postérité.

Synopsis: Expulsé par l’institution suisse qui s’occupait de lui à la fin de la Première Guerre mondiale, Antonio se retrouve en Italie contre sa volonté. Sans attache, vivant dans un grand dénuement, il s’accroche à sa raison de vivre, la peinture qu’il pratique en autodidacte. Peu à peu du public à la critique son « art » va bousculer l’académisme. Le destin incroyable et vrai d’Antonio Ligabue, l’un des maîtres de la peinture naïve aux côtés de Rousseau et Séraphine de Senlis.