Critique : Le cinéma documentaire, comme tout type de création, dispose de son lot de challenge, en particulier dans sa volonté de filmer le réel. Certains sujets peuvent en effet interroger sur la façon dont la présence de la caméra peut influencer les sujets du film, affecter la sincérité des comportements et propos pour mieux chercher ce réel avec un vrai affect émotionnel. C’est l’une des nombreuses réussites de « Pour se revoir », réalisé par Thomas Damas.

Dès les premières images, le film nous intègre dans son décor de camionnette neutre, déambulant à travers les familles brisées pour mieux essayer de renouer les liens. On sent une vraie interrogation de réalisation, comme nous le développerons dans un entretien permettant de prolonger le film, pour mieux saisir ces parents et enfants se retrouvant au sein de ce lieu clos pour, ironiquement, se confronter à un étouffement émotionnel. La sensibilité du cadre est ainsi à souligner, permettant de mieux chercher une véracité qui est nécessaire pour le rapprochement.

Ainsi, quand la présence de la caméra est mentionnée comme possible explication d’un changement de comportement de la part d’un parent, la réalisation accepte totalement son influence involontaire et se permet de mieux souligner la porosité du cinéma documentaire pour s’effacer correctement. C’est un choix intéressant de garder cette part au montage car cela permet de souligner des questionnements inhérents à la « mise en scène » alors même que le film représente un outil juridique affectif jeté malgré son importance dans le système de réconciliation. Replacer l’humain dans le judiciaire, l’émotionnel dans le réel, voici un joli challenge auquel se confronte avec réussite Thomas Damas.

Car « Pour se revoir » est un beau documentaire subtil dans sa manière de capter ses retrouvailles familiales et les tentatives de rapprochement au-delà des mécanismes du juridique. Il s’y trouve une approche pertinente dans sa manière de filmer mais en n’hésitant pas à assumer sa place, le tout avec un cœur gros comme ça. C’est donc un film qui se voit et se revoit très bien ainsi qu’un très bon documentaire belge à soutenir durant ses projections à venir.

Résumé : En Belgique, la justice organise des rencontres entre enfants et parents ayant perdu leurs droits de garde dans des Espaces-Rencontre, lieux neutres et hors conflit.