Pour le mois de janvier 2020, nous avions envie de mettre le cinéma français à l’honneur avec deux films de genre à voir dans toute bonne salle obscure. D’un côté, Qu’un sang impur, un film sur la guerre d’Algérie parfaitement millimétré. Pour les envies plus légères, nous vous proposons Je ne rêve que de vous, mêlant Léon Blum à une terrible histoire d’amour pendant la Seconde guerre mondiale.
Qu’un sang impur (9/10)
Prévu pour le 22 janvier 2020, ce film de guerre est censé, d’après nos prévisions, faire du grabuge. Entre le réalisateur bourré de talent Abdel Raouf Dafri (scénariste de Un prophète) et un sujet parfaitement maîtrisé, nous misons beaucoup sur le succès de ce film.
La guerre d’Algérie a toujours eu du mal à trouver sa juste place sur le grand écran. Ici, une scène d’introduction suffit à annoncer la (bonne) couleur au film. Trois rebelles sont faits prisonniers chez les français. Ils jouent leur vie à la courte paille. Les coups ne tardent pas à partir et ils font mal: le travail sonore intense et un plan sur le corps inerte de la première victime suffisent à nous clouer sur le siège pour les 110 prochaines minutes. La tête de mort qui figure à l’entrée de la tente des médecins annonce le ton.
Mais si le film est si bon, c’est sans aucun doute possible grâce à son casting parfait. Lyna Khoudri (déjà aperçue dans le très bon Papicha) et Steve Tientcheu signent une seconde prestation magistrale. Olivier Gourmet (qui crevait l’écran avec Edmond) nous régale et tous les autres rôles jouent avec une justesse effrayante.
» Un Apocalypse Now à la française «
L’histoire est celle du colonel Breitner, obligé de retourner en Algérie, sur les traces de son ancien officier supérieur. Cet Apocalypse Now à la française (et nous pesons nos mots) dépeint une guerre d’Algérie de manière si bonne grâce au travail sur les personnages. Il n’est pas question de pointer du doigt et de tomber dans un manichéisme infernal. Chaque rôle, chaque soldat ou civil détient sa part d’ombre.
En bref, Qu’un sang impur annonce une pure année de cinéma pleine de surprises. La puissance de chaque plan, la puissance de chaque balle tirée et le poids des actes réalisés donne un souffle inattendu au cinéma français, une claque comme on les attend année après année.
Je ne rêve que de vous (5/10)
Dans un tout autre style, le 15 janvier sortira Je ne rêve que de vous. Léon Blum après le Front populaire c’était quoi? Voici la question à laquelle Laurent Heynemann a tenté de répondre, depuis le point de vue de l’amante du père des congés payés: Janot Reichenbach.
Le scénario est tout bonnement excellent et original, nous avons la sensation agréable de découvrir quelque chose, une nouvelle facette de la France sous la Seconde guerre mondiale.
En dépit de la sympathique restitution des tensions politiques de l’époque, le parti pris du réalisateur ne nous a pas convaincu. Il a été choisi de traiter le thème avec légèreté, ce que l’on ressent dans toute la réalisation du film. De la représentation de la guerre peu significative (des soldats par ci et par là, une pauvre scène avec des bombardiers) aux dialogues exagérés, l’histoire défile sans nous embarquer dans cette terrible épreuve.
Même si les acteurs ne sont pas non plus mauvais, on peine à croire à ces péripéties. Blum voyage de prison en prison sans que l’on ressente l’aspect tragique de cette situation, sa famille le suivant avec quelques difficultés superficielles.
Je ne rêve que de vous est donc un sympathique film historique au sujet très intéressant. Nous vous le conseillons si vous souhaitez découvrir l’histoire de la gauche française durant la Seconde guerre à condition d’apprécier la légèreté dans les films de genre.