Critique : Qu’est-ce qu’on aime faire face à des titres sortis de nulle part, de ceux dont on n’a quasiment pas entendu parler et qui mériteraient pourtant d’être célébrés par leur audace, leur vivacité, leurs surprises ! C’est le cas de ce « Sister Midnight », premier long-métrage de Karan Kandhari et sorti en édition physique chez Capricci. En effet, on est vite pris par la façon dont le film vire en tonalités multiples, parvenant à toucher aussi bien à l’horreur qu’au drame ou à l’humour, dans une direction qui aurait pu virer au guignolesque boursouflé mais réussissant à maintenir un équilibre précaire tout du long, signe déjà d’une maîtrise émotionnelle aussi bien à l’écriture qu’à la mise en scène.

Le côté social prend ainsi une tournure allégorique burlesque mais pertinente, renvoyant au statut marital féminin dans une captation de l’ennui aussi triste que drôle. Ainsi, Karan Kandhari parvient à trouver une dynamique du quotidien, une énergie qui reste à propos dans son fond tout en captant son héroïne avec une sincérité aussi forte que folle. On sent un côté Wes Anderson, ne serait-ce que par son usage de la stop motion, mais jamais le film ne tombe sous le poids de références et parvient à se les approprier pour trouver sa propre voie, le tout sans diminuer la voilure, quitte à rendre sa durée légèrement longuette malgré une énergie clairement soutenue.

On vous recommande alors énormément « Sister Midnight », profitant d’une très bonne édition physique chez Capricci pour toucher une audience que ce long-métrage mérite largement. Karan Kandhari nous propose ainsi une œuvre imprévisible, déflagration partant dans tous les sens sans s’éparpiller vainement avec une inventivité qui fait grandement plaisir à voir.  Dans une période où l’on aime se plaindre que les titres sortant en salle se répètent invariablement (ce qui n’est vrai que si on s’enferme dans des divertissements manufacturés), il est indispensable de célébrer pareil titre clairement unique en son genre !

Résumé : Uma débarque à Mumbai après un mariage arrangé. Dans son taudis, elle découvre la réalité de la vie conjugale avec un mari lâche et égoïste. Refusant de céder à l’enfer de son couple, Uma laisse libre cours à ses pulsions et, la nuit venue, se transforme en une figure monstrueuse et inquiétante…