Critique : Comment représenter l’héroïsme dans notre monde ? La question peut paraître simple mais n’est clairement pas anodine, que ce soit au vu de l’actualité morose, de la représentation appuyée des figures super-héroïques sur grand écran ou de la façon dont le cynisme ambiant affecte tout ce qui peut paraître un tant soit peu positif, quitte à renvoyer ce dernier vers de la naïveté. D’ailleurs, ce mot a souvent été utilisé pour décrire le « Superman » de James Gunn, actuellement disponible en édition physique chez Warner. Pourtant, si le long-métrage est lumineux, il n’empêche qu’il est loin d’être naïf et regarde pertinemment le monde dans lequel il évolue.
En ce sens, démarrer le film par le premier échec de notre héros s’avère intéressant car il ancre le personnage dans une situation plus faillible, nous poussant à interroger son rôle là où d’autres films de super-héros récents se laissent peu aller à de telles interrogations. Le divertissement ne peut accepter la faillibilité, les erreurs, donc faire ça ne diminue pas la force du protagoniste mais l’interroge intelligemment. Tout le film va questionner Superman, ce qu’il représente dans notre société actuelle, notamment politiquement, et cela passe essentiellement par la place de Loïs Lane.
Ainsi, celle-ci peut être vue comme une représentation de James Gunn, ne sachant pas comment approcher l’humanité et l’héroïsme de pareille figure tout en essayant de conserver sa propre nature. Lors d’un échange où Superman se demande si la bonté n’est pas une forme de punk, c’est comme si le réalisateur cherchait à raccrocher sa propre mentalité rock avec la lumière de l’optimisme. Cet angle permet de rajouter en thématique d’un film qui n’hésite pas à se rapporter à l’actualité politique par son contexte de fond avec l’invasion d’un pays par un autre et les manipulations d’un Lex Luthor qui ne peut qu’être relié à diverses personnalités riches plus scrupuleuses de leur fortune que du bien-être du monde.

La mise en scène de James Gunn conserve néanmoins en dynamisme là où on aurait pu craindre une trop grande déférence. Ainsi, le réalisateur s’amuse et référence sans souci, notamment le Kaiju Eiga (comme dans « The Suicide Squad ») dans un affrontement avec une certaine ampleur réjouissante. La caméra n’hésite pas à se laisser dépasser par le héros tout en n’oubliant pas la lisibilité de l’action, constamment, bien aidée par la photographie lumineuse. C’est d’ailleurs intéressant de constater que le long-métrage n’hésite jamais à assumer sa nature colorée de Comic Book Movie jusque dans certains choix de cadres comme dans sa gestion d’univers et de mythologie. Tout du long, le film transpire l’amour de son médium d’origine tout en trouvant sa propre voie.
Cela nous donne envie de mettre de côté quelques scories (comme la storyline de Jimmy Olsen, perfectible malgré sa nature gagesque) et de louer ce « Superman » avec beaucoup d’amour vu ce qu’il transpire en affection pour son héros et ses valeurs. À l’heure où le cynisme est loué, voir un blockbuster assumer son côté solaire tout en interrogeant sa pertinence contemporaine constitue un bien fou. C’est drôle, lumineux, touchant et spectaculaire : c’est « Superman », tout simplement.
Résumé : Superman se retrouve impliqué dans des conflits aux quatre coins de la planète et ses interventions en faveur de l’humanité commencent à susciter le doute. Percevant sa vulnérabilité, Lex Luthor, milliardaire de la tech et manipulateur de génie, en profite pour tenter de se débarrasser définitivement de Superman. Lois Lane, l’intrépide journaliste du Daily Planet, pourra-t-elle, avec le soutien des autres méta-humains de Metropolis et le fidèle compagnon à quatre pattes de Superman, empêcher Luthor de mener à bien son redoutable plan ?
