Le cinéma d’horreur semble connaître un nouvel âge d’or. Parmi l’avalanche de préquelles et de remakes plus embarassants les uns que les autres, de found footages grossiers et jump scares à outrance, quelques réalisateurs tirent leur épingle du jeu en proposant un cinéma original, puissant et actuel.
Je vous propose de (re)découvrir cinq jeunes réalisateurs, tous âgés de moins de cinquante ans et s’étant récemment fait remarquer pour leurs créations innovantes
Ari Aster, KO en deux rounds
Le jeune réalisateur de 35 ans n’a que deux films à son actif mais s’est déjà imposé comme l’un des cinéastes les plus en vue de sa génération, dont chaque film suscite son lot d’attente et d’espoir.
Son démoniaque premier film Hérédité, déjà d’une grande richesse, avait marqué les esprits pour sa grande précision, un jeu d’acteur exceptionnel (Toni Colette, époustouflante) et envoyait le spectateur dans les cordes notamment grâce à un final suffoquant à en faire des cauchemars.
Avec Midsommar, il confirme qu’il est l’un des réalisateurs à suivre du moment, tant il fait preuve d’une impressionnante maîtrise tout le long de ce film d’horreur champêtre, déformant les corps, les visages et retournant l’encéphale des spectateurs.
Robert Eggers, le grand peintre classique
A peine plus âgé que le précédent (37 ans), Robert Eggers a également réalisé deux films.
Son premier long-métrage, The Witch, est un véritable film d’époque. Si sa lenteur a peu décontenancer certains spectateurs, il est d’une beauté époustouflante, rappelant les grands maîtres flamands. Porté par deux acteurs très intenses (la révélation Anya Taylor-Joy et le trop méconnu Ralph Ineson), tourné en pleine nature, il est à voir comme un hommage aux grands classiques baroques et gothiques.
Son film suivant, The Lighthouse (sorti en décembre 2019) a fait l’effet d’une petite bombe au Festival de Cannes et s’annonça comme un huis clos très lovecraftien dans lequel Willem Dafoe et Robert Pattinson sombrent dans la folie.
Une relecture de Nosferatu serait dans les tuyaux, on ne peut que se réjouir tant cela correspond parfaitement à l’univers du jeune cinéaste.
David Robert Mitchell, un cinéaste moderne et actuel
Son premier film d’horreur, It Follows (2014), revisite intelligemment le mythe de l’entité mystérieuse qui poursuit les principaux protagonistes. Grand hommage esthétique aux maîtres John Carpenter et David Cronenberg, magnifié par une partition électro mémorable, il distillait une angoisse sourde, tenace et lancinante qui poursuivait le spectateur bien après la séance.
Le jeune réalisateur est en perpétuelle évolution et a accouché en 2018 d’un véritable bijou, Under The Silver Lake, qui rebat brillamment les cartes du film noir. Assurément, David Robert Mitchell est un réalisateur à suivre.
Jordan Peele, le cinéma d’horreur social
D’abord connu du petit écran comme humoriste, Jordan Peele est devenu en deux films le représentant d’un cinéma d’horreur sous forme de satire sociale et politique. Cela fonctionne parfaitement et il est assez controversé aux Etats-Unis, suite à cette déclaration en écho à ses films : « Je ne me vois pas engager un mec blanc pour le rôle principal d’un de mes films. Ce n’est pas que je n’aime pas les mecs blancs. Mais j’ai déjà vu ce film« .
Get Out installait insidieusement l’inquiétude et l’angoisse au cours d’une première heure parfaitement maîtrisée et explosait joyeusement après un inoubliable cliffhanger. Cynique et plein d’humour, il a très justement valu à son auteur l’Oscar du meilleur scénario original.
Son deuxième long-métrage Us, porté par l’excellente Lupita Nyong’o, très politique, confirme le talent d’un réalisateur engagé et sans concession.
Il est à l’origine du grand retour de La Quatrième Dimension, que je n’ai pas encore découvert.
Mike Flanagan, un réalisateur prolifique inégal mais qui connaît ses classiques
Moins percutant que les quatre réalisateurs cités plus haut, Mike Flanagan s’est fait connaître par les très corrects mais oubliables The Mirror, Pas un bruit et Ouija : les origines, préquelle sympathique du catastrophique Ouija. Il est également l’auteur de l’adaptation (très regardable) du Jessie de Stephen King, sorti sur Netflix.
Mike Flanagan mérite sa place parmi les nouveaux chefs d’orchestre du cinéma d’horreur grâce à la série anthologique The Haunting of Hill House sortie en 2018 (Netflix, encore). Adaptée du roman de Shirley Jackson, grand hommage aux films de maisons hantées, tragédie familiale, tour à tour terrifiante et bouleversante, cette série a globalement fait l’unanimité. Le réalisateur fait preuve d’une grande maitrise, il faut voir l’extraordinaire et déja mythique plan séquence qui articule l’épisode 6. Une deuxième saison est en cours de tournage.
Son film, suivant Doctor Sleep, adapté de la suite de The Shining par Stephen King, est sorti le 30 octobre 2019 en France.