Le problème de Babylon doit tenir dans cette scène de début qui rappelle la pochade Grimsby avec Sacha baron Cohen. L’homme à tout faire Manuel (Diego Calva) est chargé de convoyer un éléphant sur les lieux d’une énième orgie organisée par dans la villa d’un richissime producteur hollywoodien. La camion patine, ne parvient pas à monter la pente, Manuel et un acolyte cherchent à pousser le camion, et là… l’éléphant se soulage sur eux, full frontal sur les déjections, c’est comique… Salle hilare mais film gâché dès le départ, impossible dorénavant de prendre au sérieux cette fable sur les excès d’un système destiné à fasciner les foules. Là où Damien Chazelle s’échine à rechercher le sérieux et la profondeur, il se perd dans des esclandres scénaristiques qui font parfois ressembler son film à un navet là où d’autres scènes parviennent plus positivement à côtoyer les étoiles. Mais 3h de film… rédhibitoire

Des intentions… en vain

Dès la grande scène d’orgie du début, les personnages sont présentés. Brad Pitt est John Conrad, acteur star au sommet de sa gloire. Diego Silva est Manuel Torres, larbin décidé à monter les échelles de la gloire. Et Margot Robbie est Nellie LaRoy, parvenue résolue à vivre la vie de star. L’ambiance très proche du Gatsby Le Magnifique de Baz Luhrmann est clairement éblouissante avec une mise en scène magnifique. Le champagne coule à flot, la musique assourdit les convives et les spectateurs. Mais nouvelle faute de gout, des mannequins dénudés se livrent à des ébats frénétiques. Le full frontal fait aussitôt retomber le soufflé, le réalisateur ne parvient décidemment pas à suggérer et il fait le mauvais choix d’imposer des images crues. Nouvelle mauvaise pioche après l’éléphant du début. Kubrick était tombé dans le même panneau dans Eyes Wide Shut, mais son film était d’un autre niveau… Manuel est un nouveau
Nick Carraway, toujours très près de l’action, plus spectateur qu’acteur, qui se brule les ailes en même temps que ses célèbres acolytes tombent en flamme. Les influences sont plus ou moins évidentes. Avec sa fine moustache et ses cheveux plaqués Brad Pitt rappelle Clark Gable mais surtout l’acteur
John Gilbert, star tombée dans l’oubli une fois le parlant advenu et le cinéma muet définitivement condamné. Nellie LaRoy est censé rappeler l’actrice aujourd’hui inconnue Clara Bow, devenue star du muet aussi rapidement qu’elle a pu tomber dans l’oubli quand sa voix de crécelle a condamné sa carrière. Avec son faciès entre Javier Bardem et Tom Hardy, Diego Silva est un nouveau venu dans le monde du cinéma, mais sans vraiment le même charisme que ses deux ainés, mais il aura le temps d’apprendre. Tous 3 sont accompagnés d’autres personnages qui se brulent les ailes au contact des moguls hollywoodiens sans scrupules. Pas de F. Scott Fitzgerald au scénario, le film multiplie donc imprudemment les longueurs et les approximations, ressemblant un peu trop souvent à un long calvaire. Damien Chazelle a vu grand, trop grand. Reste la somptueuse bande son, avec la nuit sur le mont chauve de Moussorgski, un moment très fortement inspiré du Bolero de Ravel et des airs de jazz époustouflants. Les décors sont ultra réalistes et très bien réalisés, concourant à cette ambiance d’années 20 en pleine décadence. La scène centrale du film tient dans ces multiples tournages en plein désert et cette homérique bataille tournée par un réalisateur complètement allumé. Le grand moment du film, les figurants ne savent pas retenir leurs coups et se découpent à coup d’épée en métal, les morts véritables jonchent le sol, c’est sublime de second et premier degré ^mêlé, comme tout le film aurait du être mais n’est pas.

Babylon est une vraie grande déception, si proche d’être un grand film mais bien trop éloigné de la constance nécessaire dans la qualité et dans la durée. L’ambition est là, les intentions aussi, le casting également avec une apparition surprenante d’un Tobey Maguire
(référence à Gatsby?) en gangster semblable physiquement à un vampire. Mais c’est long et inconstant, impossible d’envisager un revisionnage, au contraire. Reste un film entre le bide et le navet, bien regrettable.

Synopsis: Los Angeles des années 1920. Récit d’une ambition démesurée et d’excès les plus fous, BABYLON retrace l’ascension et la chute de différents personnages lors de la création d’Hollywood, une ère de décadence et de dépravation sans limites.