Adapté du roman éponyme de Nick Hornby, High Fidelity place le héros Rob à un carrefour de son existence. Propriétaire d’un magasin de vinyls, il se fait plaquer par sa copine et décide de renouer le fil de ses histoires sentimentales pour découvrir où le bat blesse. Sur la base d’un questionnement largement répandu à base de « Mais qu’est ce que j’ai fait de ma vie », Stephen Frears place l’acteur John Cusack au milieu de personnages hauts en couleurs et pour tout dire super attachants. Le film a marqué toute une génération, c’est le moment de découvrir pourquoi.

Un film sur nous-mêmes

Le personnage principal s’adresse continuellement au spectateur, le prenant à témoin et le transformant en confident secret. Le 4e mur est explosé pour un moment de drôlerie échevelée car l’histoire sentimentale du héros n’est qu’une accumulation de maladresses, de contrariétés et de déceptions. Sa première copine au collègue qui le plaque pour sortir avec son pote qu’elle finit par épouser, la bombasse volcanique qui lui laisse entrevoir l’eden mais le plaque également, la dépressive réconfortante qui le plaque, la copine de fac qui succombe pour de mauvaises raisons, les récits sont drôles et touchants, à la limite de la caricature mais toujours assez justes. En revenant sur son passé, le héros se rend compte que le problème ne vient pas de ses copines mais de lui-même, il a du mal à s’engager… qui n’a pas connu cet écueil? Voilà, le film brosse une réflexion universelle qui ne peut qu’interpeller chacun de nous.

De la musique qui tue

Le bouquin de Nick Hornby plaçait son histoire au cœur de Londres, Stephen Frears déplace son héros à Chicago avec une incidence immédiate sur le contenu de la bande son. Car la musique lorgne plus du côté des Etats-Unis que de l’Angleterre. Love, Velvet Underground, Bob Dylan, Stevie Wonder, c’est un best-of, avec quand même de fortes incursions britanniques: The Beta Band, Stereolab, The Kinks, les fans de pop rock apprécieront. Le film donne l’impression au spectateur d’avoir mis ses propres disques sur la platine pour des images de sa propre vie qui défilent. Le héros aime la musique anglosaxonne des années 60 à 80, le réalisateur également, l’auteur aussi, tout le monde s’y retrouve si tant est que le spectateur soit tout aussi fan. A chaque visionnage, qui arrive immanquablement une fois par an pour certains comme moi, c’est un ravissement. Et puis le film s’adresse aux collectionneurs, ceux qui ont connu l’époque avant Internet où il fallait accumuler des disques, des cassettes ou des CD’s pour se faire une discothèque. Le streaming a tout remis en cause mais la fascination de l’objet est bien retranscrite dans quelques digressions qui toucheront ceux qui, comme moi, ont des cartons remplis de disques dont ils ne parviennent pas à se débarrasser…

Des personnages bigger than life

Si le héros a tout du mec moyen ni incroyable ni complètement loser, les autres personnages comportent tous un je-ne-sais-quoi de WTF, à commencer par Barry (Jack Black), le fan de musique extrémiste qui méprise tous ceux qui ont l’audace de vouloir pénétrer un univers musical dont il se considère comme seul défenseur. Scènes cultes, réparties, expressions, le personnage est un des incontournables du film, tout comme son acolyte Dick (Todd Louiso) aussi coincé que Barry est extravagant. Là aussi, un vrai rôle de composition. On peut également citer Ian Raymond (Tim Robbins), sorte de gourou zen new age chez qui la copine Laura (Iben Hjejle) se réfugie pour partir du bon pied. Toute cette galerie, complétée d’autres zigotos gratinés, donne un tour d’horizon assez large des sortes d’êtres humains fréquentant notre univers. C’est toujours touchant, jamais vulgaire, de quoi donner envie de se repasser quelques scènes marquantes sur YouTube.

Si avec tout ça vous n’avez toujours pas envie de découvrir ce film de 2000, je ne peux plus rien pour vous. Le film est truculent, drôlissime, avec une bande son inoubliable, avec des références que les plus calés reconnaitront aisément. High Fidelity est un film culte, au moins pour moi. Et vous?