Sur un ton de thriller rondement mené, le film iranien Les nuits de Mashhad dépeint les détails d’un évènement véridique datant du début des années 2000. Un tueur en série officiait dans la ville saint de Mashhad, décimant des femmes sous le prétexte qu’elles vendaient le corps, infamie suprême pour le scélérat, moyen de subsister pour ces femmes obligées de vendre leur corps pour subvenir aux besoins de leurs progénitures. Le film dévoile les différents points de vue dans un déroulé qui tient en haleine.

L’Iran, si loin si proche

Pasolini montrait dans son film Mamma Roma de 1962 une héroïne obligée de se prostituer pour survivre. C’est le même principe utilisé par Ali Abbasi dans un contexte cependant plus sordide. Une journaliste, interprétée par une Zarha Amir Ebrahimi récompensée du prix d’interprétation féminine au Festival de Cannes 2022 et interprétant une journaliste sur la piste du tueur. Elle se rend vite compte que le tueur fait les affaires d’une police incapable de juguler la prostitution, et d’une population ulcérée par ce phénomène. Le film met au centre du jeu l’hypocrisie d’état devant un phénomène trop largement répandu et rendant compte des disparités de moyens au sein de la population. Les images sont crues, surtout pour un film iranien, les corps sont montrés, les actes sont loin d’être éludés, la population exsangue se livre à un trafic des corps dénoncé mais peu attaqué. Le tueur est un personnage clé du film, père de famille, marié, mais sûr de son fait, sans regrets ni remords. Dans la ville sainte de Mashhad, il se sent légitime de la vendetta qu’il livre contre des impurs. La dualité entre la quatre de vérité de la journaliste et le criminel impudent révèle un parallélisme ambigu au sein de la société iranienne. L’état religieux contre la vérité du terrain, le discours policé de façade contre les conditions de vie indécente au revers. Et puis ce sont les femmes qui trinquent, les scènes de sexe tarifé donnent la nausée devant ces sacrifices de soi punis injustement par un criminel justifiant ses actes sur l’autel de la religion.

Les nuis de Mashhad est un thriller certes mais surtout une lucarne ouverte sur les travers d’une société corsetée et obligée d’avoir recours aux mêmes éternels expédients pour subvenir à ses besoins. Ici ou là-bas, la logique est finalement la même…

Synopsis:
Iran 2001, une journaliste de Téhéran plonge dans les faubourgs les plus mal famés de la ville sainte de Mashhad pour enquêter sur une série de féminicides. Elle va s’apercevoir rapidement que les autorités locales ne sont pas pressées de voir l’affaire résolue. Ces crimes seraient l’œuvre d’un seul homme, qui prétend purifier la ville de ses péchés, en s’attaquant la nuit aux prostituées.