En matière de physique, les noms d’Einstein et de Newton sont beaucoup plus connus que celui d’Oppenheimer. Directeur scientifique du projet Manhattan, il est surtout rentré dans l’histoire comme le père de la bombe atomique. Les 3h du film de Christopher Nolan montrent surtout qu’il était bien plus que ça. Esprit supérieur, il était à la pointe en physique quantique, capable de maitriser tant de langues (Anglais, allemand, hollandais, français, yiddish, sanskrit…) et de faire aboutir un projet décisif pour vaincre un Japon prêt à se battre au prix de millions de victimes. Le déroulé chronologique agrémenté de marche avant et de marche arrière se suit comme un vrai thriller, passionnant mais pas sans défauts à cause des nouveaux tics de langage d’un réalisateur un peu trop collé à des procédés cinématographiques apparus voilà quelques films.

L’histoire d’un homme seul

Christopher Nolan a mis les petits plats dans les grands pour son biopic. Il fait appel à de nombreux de ses interprètes habituels (Cillian Murphy, Kenneth Branagh, David Dastmalchian) et tant d’autres nouveaux apparaissant à un rythme frénétique jusqu’à ce que la tête des spectateurs se mette à tourner (Florence Pugh, Robert Downey Jr, Matt Damon, Rami Malek, Casey Affleck, Josh Harnett, Dane DeHaan, Gary Oldman, Ben Safdie, Jason Clarke, mais pas de Christian Bale ni Benedict Cumberbatch 😀). Le film part comme un biopic et se termine en film de procès tortueux avec les manigances véridique mais montées en épingle de Lewis Strauss (Robert Downey Jr) contre Oppenheimer, de quoi faire perdre le fil, surtout que ce n’est pas vraiment passionnant, du coup. Les parties biopic et l’auscultation des arcanes du projet Manhattan se suivent avec grand intérêt, mais la tragicomédie judiciaire est rendue quelque peu artificielle. Car dans cette dernière partie, Nolan use et abuse de son nouveau tic de langage cinématographique, le décompte sonore répétitif et agrémenté de tic tac trépidant. Ca fonctionnait dans Interstellar, beaucoup moins dans Dunkirk, encore moins ici. Le procédé sonore vire maintenant au gimmick cinématographique, aussi peu original qu’agaçant. Les images ne se suffisent plus à elles-mêmes, le rythme est artificiellement accéléré avec un éternel tic tac. Ou comment transformer une bonne idée en étau stylistique. Mais les 3 parties du film sont bien équilibrées, le spectateur ne s’ennuie pas et ne se sent pas pris en otage par les 3h du film, ni longues ni ennuyeuses. La densité du film est stupéfiante, le réalisateur ne veut rien oublier, faisant même appel à un Albert Einstein à la tignasse toujours aussi hirsute.

Oppenheimer est véritablement le film de la mi-juillet, à ne manquer sous aucun prétexte. Une salle raisonnablement pleine peut tout de même surprendre pour un film sur un scientifique plongé dans un contexte militaire. Pas un film grand public du tout, mais la magie Nolan fonctionne, avec son casting foisonnant, son intrigue tortueuse et ce rappel sur la place ambiguë des scientifiques. Détenteurs de la connaissance mais pas forcément habiles pour manœuvre face aux politiques et aux militaires. Plus intelligents mais moins machiavéliques, c’est le reflet d’une dure réalité.

Synopsis:
En 1942, convaincus que l’Allemagne nazie est en train de développer une arme nucléaire, les États-Unis initient, dans le plus grand secret, le « Projet Manhattan » destiné à mettre au point la première bombe atomique de l’histoire. Pour piloter ce dispositif, le gouvernement engage J. Robert Oppenheimer, brillant physicien, qui sera bientôt surnommé « le père de la bombe atomique ». C’est dans le laboratoire ultra-secret de Los Alamos, au cœur du désert du Nouveau-Mexique, que le scientifique et son équipe mettent au point une arme révolutionnaire dont les conséquences, vertigineuses, continuent de peser sur le monde actuel…