Bad boys, bad boys! Watcha gonna do, watcha gonna do when we come for you? De-naz-naz-neez-no-na-heeee!

Le cinéma d’action, un art délicat mais maîtrisé par Michael Bay

Un film d’action ne se fait pas n’importe comment. En principe (je parle bien de principe, beaucoup trop confondent avec la règle), il faut savoir construire ses plans, penser à la durée de chaque plan et choisir ses mouvements de caméra pour que les plans soient lisibles à l’écran, chorégraphier correctement les acteurs pour éviter qu’ils ne soient complètement paumés au point d’avoir l’air de danser la salsa, avoir un rythme suffisamment dynamique pour maintenir l’attention du spectateur mais en même temps un montage suffisamment lisible et qui respire pour éviter d’avoir quelque chose de bâclé et impersonnel, etc.

Parmi les réalisateurs qui se sont essayés au genre, six ont réussi à tirer leur épingle du jeu: John McTiernan (Piège de Cristal et Une Journée en Enfer en attestent), George Miller (il suffit de voir Mad Max : Fury Road et Furiosa pour s’en rendre compte), John Woo (The Killer et À Toute Épreuve sont ses meilleurs exemples), Chad Stahelski (avec son expérience de cascadeur, il sait chorégraphier les combats et les rendre lisibles à l’écran, la saga John Wick en est la preuve), David Leitch (comme Stahelski, il a été cascadeur, lui aussi sait chorégraphier les combats et les mettre en valeur à l’écran, Atomic Blonde et Bullet Train en témoignent), et enfin Michael Bay.

Il est très souvent tourné en dérision pour son utilisation systématique de son artifice préféré: l’explosion. Chez Michael Bay, y a tout qui explose!

Pensez à cette ref par le Joueur du Grenier: »Michael Bay présente des trucs qui explooooooooosent! BOUMBOUM, les voitures, BOOOOM! Avec Terminator qui vient pour protéger le passé en lui explosant la GUEEEEEEEULE!!! BOOM, la voiture télécommandée en plastique, BOOOM, la plante, BOOM! Même les phrases du trailer, elles font BOOOOM!!! ».

Le réalisateur est même souvent décrié dans le milieu cinéphile. À juste titre? Nenni.

On peut faire toutes sortes de reproches à Michael Bay, de faire presque uniquement des gros films d’action bourrins (et encore, The Rock et Ambulance sont loin d’être aussi abracabrantesques que Transformers ou Bad Boys 2, quant à d’autres comme 13 Hours, c’est bien plus qu’un bête film d’action dans lequel ça défouraille) ou d’être tyrannique sur ses tournages, mais s’il est une chose qu’on ne peut lui reprocher, qu’on se doit de lui reconnaître, c’est d’avoir sa touche artistique, sa vision d’auteur. Ça va vraisemblablement choquer les cinéphiles avec un balai dans le derche, mais oui, Michael Bay est un auteur, il a une patte artistique bien à lui qui a eu une influence considérable sur bon nombre de films d’action de la fin des années 90 et de la décennie 2000. C’est dingue, hein?

Bad Boys 2 est un film, il faut le dire, survolté! Il va à 200 à l’heure, ça défouraille et ça pète de partout, mais Michael Bay fait ça bien! Le montage est carrément sous coke, ça cut dans tous les sens, et pourtant le film reste fluide et agréable à regarder. Pourquoi? Parce que chaque plan, même le plus court, a été intelligemment pensé. Aucun ne semble avoir été négligé.

Bien sûr, les plans de Bad Boys 2 ne sont pas propice à l’interprétation comme chez Stanley Kubrick, Ari Aster ou Brian De Palma, mais ce n’est pas le but.

Michael Bay sait faire un film au montage haché sans que ça ne soit bâclé. Dans la photographie et le montage, on sent sa patte. Avec un yes-man à la réalisation, le film ne serait absolument pas le même. Si les vingt-mille coupes à la seconde dans les scènes de dialogues ne sont pas tellement intéressantes, en revanche elles prennent leur sens et leur intérêt dans les scènes d’action. De plus, le film ne se contente pas d’un montage haché, certains sont plus longs, plus lents, plus amples.

Cas de figure 1: La première mission

Lors de la mission d’interception d’un groupe de suprémacistes blancs au début, au milieu d’une fusillade hallucinée dans laquelle tout le monde se tire dessus et ça coupe dans tous les sens, lorsque Mike appelle Marcus et tire en mode John Woo en direction d’un suprémaciste armé d’un fusil, quatre longs plans au ralenti se succèdent: La balle qui file droit devant pendant que Marcus commence à se tourner, la balle qui passe à travers plusieurs bocaux et bouteilles en verre, la balle qui charcute superficiellement le cul de Marcus, qui étouffe une espèce de hurlement en faisant une de ses tronches les plus drôles, et enfin la balle qui atteint le suprémaciste dans le cou.


Certes, en terme de nombre de plans, quatre, c’est beaucoup, mais ils ne se contentent pas de bêtement suivre la balle sur plusieurs angles différents, chaque plan montre quelque chose de différent: le premier montre la cible et les obstacles qui se dressent sur la trajectoire de la balle, le deuxième montre la balle outrepassant les obstacles, le troisième montre le dommage collatéral comique, et le quatrième montre l’impact. Dans n’importe quel film d’action générique récent, cette séquence aurait été charcutée en dix plans. Cette séquence aurait été impossible à montrer en un seul plan, il aurait fallu le tourner presque entièrement en images de synthèse (et donc ce serait moche) et il ne serait pas lisible à l’écran. Même deux plans n’auraient pas suffi. Trois, à la limite, et encore, il faudrait condenser les deux premiers plans en un, et pour réunir la balle filant et passant à travers le verre en un seul plan, il faudrait recourir à un rapide travelling avant qui suit la balle en FPS, ce ne serait pas agréable à regarder. Supprimer le plan latéral de la balle traversant le verre, peut-être. En quatre plans, on a un bon équilibre.

Cas de figure 2: L’interception chez les Haïtiens

Il s’agit sans conteste d’une des meilleures scènes du film. Mike et Marcus recherchent le chef du gang haïtien qui a tenté de tuer Syd (Gabrielle Union), un agent de la DEA sous couverture (et la sœur de Marcus et l’amante de Mike) qui était en pleine opération de blanchiment d’argent avec des Russes. Après un passage dansant et hilarant chez Icepick, l’indic de Mike, nos deux superflics se font canarder par surprise par les Haïtiens dans une maison.L’essentiel de la scène consiste en un long travelling circulaire montrant tour à tour Mike dos à un mur pointant ses flingues vers les deux portes et de l’autre côté les Haïtiens postés près des portes. Ce travelling est si bien pensé et filmé!

Franchement, ça défonce!

Ça respire et c’est esthétique, mais en même temps c’est dynamique et ça nous plonge dans la tension de la scène. Pas besoin de faire une dizaine de coupes pour montrer la scène de fusillade en huis clos sous tous ses aspects.

Un humour décapant

Non seulement Bad Boys 2 est riche en action bien faite, mais il est surtout drôle! On rigole bien devant! Outre certains gags un peu bas du front (mais qui me font rire) comme Marcus qui aperçoit un rat en train d’en sauter un autre et la balle que Marcus se prend dans le popotin, on a droit à des gags de génie tellement bien pensés, comme les accès de colère du capitaine Howard (Joe Pantoliano), le passage chez Icepick, le whoosah et:

Cas de figure 1: Le magasin d’électronique

Après l’interception musclée chez les Haïtiens, Mike et Marcus récupèrent un caméscope, dont ils vont visionner le contenu sur une télé dans un magasin d’appareils électroniques. Première gaffe: l’employé du magasin, pas doué, se trompe et met toutes les télés du magasin sur la même source pendant que passe une des vidéos du caméscope, montrant une nénette en train de se faire sauter dans une voiture. Le gérant débarque et débranche le caméscope et change de source. Mike rejoint un Marcus à bout de nerfs qui lui parle de problèmes d’érection dans une pièce à côté, sans savoir que les deux sont filmés en direct et que tout est retransmis dans les télés du magasin, son compris. Et tout le monde pense qu’ils sont gays.

Tout raconter du début à la fin casse la surprise, mais je ne pouvais pas ne pas en parler!

Cas de figure 2: Reggie

Dans le dernier tiers du film, Marcus fait la rencontre de Reggie, un adolescent (qui fait plus que son âge) venu chercher Megan, la fille de Marcus. Ce dernier l’intimide, avec Mike jouant les alcooliques. L’acteur qui joue Reggie n’avait jamais vu Martin Lawrence et Will Smith auparavant sur le tournage, donc la surprise était énorme! Je ne peux pas expliquer la scène du début à la fin, elle doit simplement être regardée!

Cas de figure 3: L’ecstasy

Après la rencontre avec Reggie, Mike et Marcus s’infiltrent dans une morgue et y découvrent, toute la cargaison d’ecstasy que Johnny Tapia fait expédier depuis Cuba, rangée et tassée dans des cercueils, avec des cadavres. Marcus prend par mégarde deux pilules d’ecstasy en buvant un verre d’eau. Quand ils sortent de la morgue, Marcus, sous l’effet de l’ecstasy, se met à divaguer et à faire le pitre, un moment d’anthologie dans l’histoire de la comédie!

‘llooooooooooo, captaaaaaon!

Synopsis

Le baron de la drogue cubain Johnny Tapia (Jordi Mollà), réputé intouchable, fait circuler des quantités importantes de pilules d’ecstasy dans les boîtes de nuit les plus branchées de Miami, dont une dirigée par des Russes, sur laquelle il souhaite avoir la mainmise.

Au cours d’une mission spéciale, Mike Lowrey (Will Smith) tire accidentellement une balle dans les fesses de son coéquipier, Marcus Burnett (Martin Lawrence). Ce dernier, humilié et affreusement gêné d’avoir à faire équipe avec quelqu’un qu’il juge de plus en plus irresponsable et immature, demande une mutation.