Critique : Rappeler que le cinéma de David Cronenberg s’est régulièrement greffé à un doute identitaire pourrait s’avérer être aussi utile que déclarer que l’eau mouille, mais il semble que c’est un aspect qui est de plus en plus diminué quand il s’agit d’aborder ses films. Renvoyé à son usage d’un body horror à l’héritage palpable, le réalisateur canadien interroge constamment la place du soi, notamment par ce biais graphique mémorable. C’est pour cela que la découverte de « Spider » peut surprendre à priori tout en restant dans la lignée de ses nombreuses créations par son rapport trouble au souvenir et au rapprochement de la mémoire.
Ainsi, le récit ne se dirige pas vers une forme de rejet organique et prend des contours à priori plus classiques dans sa forme, tout en maintenant les thématiques du metteur en scène. La balade de Dannis Cleg (très bon Ralph Fiennes) dans son passé s’avère intrigante, s’inscrivant dans des décors industriels britanniques marqués visuellement tout en proposant des idées réflexives qui aboutissent avec intérêt, notamment dans un choix de casting. Il s’avère alors regrettable que le rythme imposé par la narration amène une distance permanente, tout en s’avérant pertinent dans son propos de l’image dévoyée qu’il faut constamment questionner. Cela peut créer un rejet de spectateur logique tout en donnant néanmoins envie de rester plongé dans ce mal-être ambiant jusqu’à sa résolution renvoyant au doute distillé dès le début.
Moins abordé que les titres les plus connus de David Cronenberg, « Spider » n’en est pas moins dénué d’intérêt, notamment dans ce qu’il instille d’idées réflexives qui nous renvoient inconsciemment dans une forme de perte de repères spectatoriaux. On se laissera alors tenter ou non par cette ressortie chez Metropolitan mais force est de constater que, malgré son approche sans doute moins facile que la plupart de ses œuvres, ce film s’inscrit autrement dans les réflexions d’un metteur en scène toujours aussi passionnant à analyser, encore et encore, afin de retrouver son soi dans des images perdues et floues émotionnellement.
Résumé : Tout juste libéré de l’hôpital psychiatrique, Dannis Cleg – surnommé Spider – est envoyé dans un foyer londonien. Les fantômes du passé ressurgissent. David Cronenberg fait le portrait d’un schizophrène interprété par Ralph Fiennes qui trouve ici le rôle de sa vie. Entre passé et présent, rêves et cauchemars, découvrira-t-il l’origine de sa folie en se rendant au centre de la toile ?