
L’Étranger est le premier roman publié d’Albert Camus, paru en 1942. Devenu un des romans français les plus lus au monde avec Le Petit Prince et 20 000 lieues sous les mers, François Ozon en livre une adaptation extrêmement fidèle malgré son statut de roman inadaptable, comme quoi c’était possible. Le résultat est un film linéaire, baigné dans un Noir et Blanc classieux, aux images sublimes et à l’inventivité quasi nulle, adaptation fidèle mais quelque peu inutile.
Un livrer supérieur au film
Pour tout dire, malgré ses qualités, le film est loin de surpasser le livre, la lecture reste encore le meilleur moyen de découvrir cette histoire sur l’absurdité de l’homme et de la vie en général. Souvent cité comme rappelant les procès staliniens, le livre brosse le portrait abrupt de Meursault (Benjamin Voisin), jeune homme discret à la vie calme confronté à un drame qui va le révéler aux autres. Visiblement peu ému par la mort de sa mère, pas intéressé par une promotion qui l’amènerait à voyager entre Alger et la métropole, peu enthousiaste à l’idée d’un mariage avec son amie Marie (Rebecca Marder), il mène une vie stricte et sans joie. Le film suit exclusivement son héros et les autres personnages sont observés exclusivement sous l’angle de l’interaction avec lui, comme pour le récit du livre tout entier construit du point de vue du narrateur et qui exclut tout autre point de vue. Le réalisateur adjoint un point de vue moderne, une sorte de critique très actuelle du colonialisme qui n’existait pas encore au début des années 40, question d’époque. Les personnages arabes ne sont jamais nommés et constituent un arrière-fond passif à la vie des personnages européens qui eux ont des noms et des identités. Les premiers sont nommés Les Indigènes, ce qui souligne leur place subalterne dans la hiérarchie des hommes à cette époque. Le film est destiné à connaitre un grand succès à la prochaine cérémonie des César, il rappelle aux plus jeunes l’existence d’un livre majeur de la littérature française, mais le film n’invente rien, il élude même la réflexion sur l’absurdité de la condition humaine comme point de départ de la révolte devant l’injustice de l’histoire et de l’humanisme. Il faut dire, ce ne serait pas une mince affaire que de le porter à l’écran.
Le film évoque surtout l’athéisme raisonné du héros et l’absurdité de sa vie et de son acte, ce qui n’est pas vraiment cinégénique. Reste cette scène de dispute théologique à la fin du film, rare moment d’action dans un film forcément lent et didactique, laissant imaginer une possible adaptation qui trahirait forcément le texte original, mais pour le bien du film et du cinéma.
Synopsis: Alger, 1938. Meursault, un jeune homme d’une trentaine d’années, modeste employé, enterre sa mère sans manifester la moindre émotion. Le lendemain, il entame une liaison avec Marie, une collègue de bureau. Puis il reprend sa vie de tous les jours. Mais son voisin, Raymond Sintès vient perturber son quotidien en l’entraînant dans des histoires louches jusqu’à un drame sur une plage, sous un soleil de plomb…