Critique : Les droits des femmes ont beau devoir être un acquis, la violence de notre monde rend la lutte malheureusement permanente. Il suffit de constater le nombre toujours important de féminicides ou ces obligations morales que l’on impose pour constater l’obligation de rappeler la nature élémentaire de ces besoins. La sortie du film « Annie Colère » rappelle donc la nature essentielle de cette prise de parole en conservant tout du long un regard sororal rassurant.
Le film trouve ainsi un équilibre surprenant entre la colère intériorisée d’un combat qui devrait être inutile (rappeler que c’est aux femmes de faire ce qu’elles veulent de leurs corps) et un apaisement par rapport aux membres de la MLAC. Le réconfort que s’apportent chacune de ces femmes touche, émeut grandement tout en ne diminuant jamais l’importance de leurs idées. Le rapport à l’avortement se voit alors amené avec un apprentissage doux, le rappel du danger de faire de cet acte quelque chose de clandestin, tout en apportant un côté solaire qui célèbre la sororité. La tendresse en opposition à la violence patriarcale, voilà une belle arme qui permet de bouleverser complètement l’audience dans son fond.
La forme va également dans cette orientation, la mise en scène de Blandine Lenoir sublimant le quotidien de sa beauté tout en restant en permanence à fleur de peau dans son émotion. Les actrices, Laure Calamy en tête, y sont magnifiques d’humanité, la direction apportant un sentimentalisme fort mais jamais gratuit au récit. Et quand la lutte semble enfin prendre fin, la conclusion rappelle la nature perpétuelle du combat avec une amertume qui sidère par ce qu’elle rappelle de notre réel.
Quel beau et grand film que cette « Annie Colère », titre absolument essentiel par son propos et sa forme. C’est une célébration de la lutte, de la force de ces femmes qui se retrouvent à lutter constamment pour leur bien-être et au pouvoir de la sororité face à une société mâle qui impose ses attentes. C’est donc un film indispensable à (re)voir d’urgence.
Résumé : Février 1974. Parce qu’elle se retrouve enceinte accidentellement, Annie, ouvrière et mère de deux enfants, rencontre le MLAC – Mouvement pour la Liberté de l’Avortement et de la Contraception qui pratique les avortements illégaux aux yeux de tous. Accueillie par ce mouvement unique, fondé sur l’aide concrète aux femmes et le partage des savoirs, elle va trouver dans la bataille pour l’adoption de la loi sur l’avortement un nouveau sens à sa vie.