Chronique : Les hasards du calendrier font que deux documentaires à la même approche formelle sortent quasi en même temps. D’un côté, « Italia, Le Feu, Le Cendre » débarque au cinéma chez Carlotta pour montrer le développement cinématographique de l’Italie avant sa bascule sous le régime fasciste. De l’autre, « Babi Yar Contexte » revient sur un des chapitres les plus sombres du massacre de personnes juives avant l’ouverture des camps de concentration, avec une sortie en édition DVD chez Blaq Out. Malgré leurs nombreuses différences, l’imposition commune d’affronter des images d’histoire pour mieux en résulter leur puissance nécessite d’être mise en avant.
Concernant « Italia », l’accumulation des images d’archives aurait pu basculer vers l’étouffement. C’est pourtant tout le contraire qui en résulte tant il s’y développe une grâce aussi marquante que le timbre de voix unique de Fanny Ardant. Loin de la simple voix off, l’actrice s’y révèle comme une accompagnatrice dans cet amas où l’on sent toute une industrie explosant sans nécessairement savoir que les flammes de la violence sont en chemin. Il en ressort quelque chose d’émouvant et touchant autant au travail historique passionnant qu’à un objet de pur cinéma, véritable lettre d’amour à une production méritant d’être remise en avant par ses promesses et ses accomplissements mémorables, entre splendeur et amertume.
« Babi Yar Contexte » s’avère par son sujet plus grave, abordant une part importante d’histoire qui aurait pu être effacée des mémoires. Là encore, l’importance de l’image est centrale pour justement ne pas oublier cette extermination de masse. Une nouvelle fois, le travail de restauration apporte un intérêt visuel fort alors même que l’absence de voix amène une distanciation moins austère que glaçante. L’impact est plus mémorable encore, surtout au vu de son ancrage en Ukraine, tout en parvenant à transcender une certaine cinématographie historique.
Là où le premier amorce l’horreur de la seconde guerre mondiale, le second l’illustre. Ce qui est sûr, c’est qu’il est d’un intérêt fort, aussi bien d’un point de vue cinématographique que de leur rapport à l’image du passé, de découvrir des films comme « Italia, Le Feu, La Cendre » et « Babi Yar Contexte » au vu de l’importance visuelle de ces deux documentaires rappelant la nécessité de l’image dans le travail de réflexion historique et dans l’impact aussi bien mémoriel qu’émotionnel.
Résumé : Italia, Le Feu, La Cendre est un film entièrement composé d’images d’archives tournées en Italie entre 1896 et 1930, dont la plupart n’ont jamais été montées depuis leur sortie en salles, au début du XXe siècle. Conçu sous la forme d’un essai lyrique et onirique, ce documentaire retrace la naissance du septième art dans une Italie à peine unifiée, de ses premières images jusqu’au parlant et la chute dans le précipice du fascisme.
Babi Yar Contexte : C’est le plus grand massacre de la « Shoah par balles ». Avant la mise en place des camps de concentration, les juifs sont en effet exécutés par des fusillades en masse. C’est ainsi que plus de 33 700 juifs périrent dans le ravin de Babi Yar près de Kiev, en 1941. BABI YAR. CONTEXTE revient sur cette terrible tragédie, devenue le symbole de l’extermination des juifs en Ukraine.