Chronique : Le premier plan du long-métrage d’Anne Le Ny est sans doute le plus symbolique de l’entreprise, suivant un cours d’eau de manière tranquille jusqu’à ce qu’arrive un symbole discret mais direct du malaise à venir. En effet, l’engrenage dans lequel va s’enfermer Alexandre s’entame par le regard de sa fille, Juliette, avec une normalité assez désemparante. On passe d’un quotidien assez banal à une vérité qui finit par éclater et mener au drame dans un acheminement qui fonctionne justement par son réel. C’est peut-être le point fort du film : sa façon de traiter le drame de son thriller par un quotidien perturbé, un normal où la fatalité s’abat de manière brutale tout en s’ancrant dans une logique d’accumulation d’événements qui auraient dû prémunir celui-ci.

La mise en tension de l’intrigue s’avère alors passionnante, surtout aidée par les compositions de José Garcia et Capucine Valmary. Cette dernière offre une prestation intéressante par le rôle le plus impactant du long-métrage. Pourtant, il manque quelque chose pour que le film trouve un souffle, un étouffement qui aurait pu étreindre plus les personnages et les pousser encore plus à leur limite. La mise en scène ne semble pas parvenir à passer ce cap mais est-ce en même temps son intention, cherchant à capter la friction du réel par ce décès qui ne peut être réellement appréhendé ?

C’est peut-être alors dans ses envies que le film trouve sa réussite et sa faille, sa discrétion visuelle ne parvenant pas à exhorter la déflagration de ses événements tout en captant une dissonance troublante justement par sa volonté de ne pas surjouer du drame. Il n’en reste pas moins que « Le torrent » frustre par cela, tout en s’avérant intéressant dans la construction de son engrenage. Le film d’Anne Le Ny se pare en plus de bonnes prestations qui confondent encore plus cette envie de représenter un drame dans toute sa confusion, ses confrontations et sa culpabilité ambiante.

Résumé : Lorsqu’Alexandre découvre que sa jeune épouse, Juliette, le trompe, une violente dispute éclate. Juliette s’enfuit dans la nuit et fait une chute mortelle. Le lendemain, des pluies torrentielles ont emporté son corps. La gendarmerie entame une enquête et Patrick, le père de Juliette, débarque, prêt à tout pour découvrir ce qui est arrivé pendant cette nuit d’inondations. Alexandre qui craint d’être accusé, persuade Lison, sa fille d’un premier lit (18 ans), de le couvrir. Il s’enfonce de plus en plus dans le mensonge et Patrick commence à le soupçonner. Piégée entre les deux hommes, Lison pourrait tout faire basculer. C’est le début d’un terrible engrenage…