Critique : Le septième art semble avoir toujours été fasciné par les braquages, ce qui n’est pas étonnant quand on connaît le parallèle régulier fait avec la préparation de films. Ces derniers sont nombreux à mettre en lien un « coup » et la production cinématographique, à l’instar d’un « Inception » par exemple. Bien évidemment, « Ocean’s Eleven” rentre dans cette catégorie mais le fait avec une approche différente et pourtant encore pertinente près de 20 après sa sortie. Il faut dire que Steven Soderbergh soigne d’abord sa mise en scène, contribuant à un sentiment d’élégance tout au long de son long-métrage. Sa caméra propose de nombreuses idées sans tomber dans le trop ostentatoire comme s’il voulait capter un bling bling digne de Las Vegas sans succomber à ses appels.

Cela passe également par un casting hollywoodien hautement prestigieux : George Clooney, Brad Pitt, Julia Roberts, Matt Damon, … Le gratin est présent et souligne justement la nature haut de gamme du long-métrage. Pourtant, ce ne serait que limiter le film que de se concentrer sur cet aspect vu qu’il se déroule souvent en coulisses ou en marge, faisant d’un de ses protagonistes un croupier, passant par des coins plus obscurs et autres bars où tout est appel à la dissimulation. Quand le clinquant semble apparent, il ne sert finalement que de poudre aux yeux, manipulant autant que Terry Benedict ou tout simplement Danny Ocean sur le long-métrage.


Copyright Warner Bros. France

Derrière le romantisme de l’homme qui cherche à récupérer son amour perdu à cause de ses erreurs, il y a ainsi un traitement social qui peut se voir entre ces escrocs en marge face à un tout puissant connu comme agent de destruction (littéralement avec un ancien hôtel). C’est comme si une forme de gentleman cambrioleur revenait pour mieux se venger d’une ville qui détruit perpétuellement, capitalisme aux dents longues qui confond passion avec possession. Là, les sentiments parviennent à poindre dans leur simplicité et dans une certaine zone de confort. Quand Danny demande à Tess si son nouveau compagnon la fait rire, elle répond qu’il ne la fait pas pleurer. Réplique certes astucieuse (le long-métrage en compte son lot) mais révélatrice d’une zone de flou sentimental qui va nourrir les personnages (et continuera à le faire dans le second).

Dans ce même sens, si le charme rétro qu’il cherche à recréer en remakant « L’inconnu de Las Vegas » subsiste, il y a quand même une envie de modernité qui se dégage. Certaines personnes pourraient rire en voyant l’usage de ce terme pour un film sorti il y a 22 ans mais c’est justement dans ce prisme que ressort la cinégénie du long-métrage. C’est ainsi que le parallèle avec la création cinématographique revient, de manière attendue avec sa phase de casting ou ses répétitions mais également par la simple manière de mettre en scène. La manipulation au sein du braquage est simple mais relève de l’artifice fictionnel assez grisant dans son traitement, encore plus quand il s’agit de l’usage de l’écran. Le climax voit ainsi un moniteur dégager le mensonge (et permettre le casse) tandis que l’autre sert de révélateur émotionnel. La franchise de l’image se fait parasiter par la création fictionnelle dans une approche clairement marquée et toujours aussi passionnante.


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Si l’on oublie régulièrement la tristesse induite de la fin du film avec cette fuite permanente annonçant déjà le second opus, « Ocean’s Eleven » ne perd clairement jamais de sa verve assez folle. D’un entrain fort tout en dessinant un Las Vegas aussi luxueux que marqué par ses « losers », le film de Steven Soderbergh magnifie l’arnaque et dépeint en allégorie une lutte cinématographique des plus intéressantes. Comme quoi, les bons films peuvent être comme les meilleurs vols tant on en parle avec toujours autant d’élan malgré les années…

Résumé : Après deux ans passés dans la prison du New Jersey, Danny Ocean retrouve la liberté et s’apprête à monter un coup qui semble impossible à réaliser : cambrioler dans le même temps les casinos Bellagio, Mirage et MGM Grand, avec une jolie somme de 150 millions de dollars à la clé. Il souhaite également récupérer Tess, sa bien-aimée que lui a volée Terry Benedict, le propriétaire de ces trois somptueux établissements de jeux de Las Vegas. Pour ce faire, Danny et son ami Rusty Ryan composent une équipe de dix malfrats maîtres dans leur spécialité. Parmi eux figurent Linus Caldwell, le pickpocket le plus agile qui soit ; Roscoe Means, un expert en explosifs ; Ruben Tishkoff, qui connaît les systèmes de sécurité des casinos sur le bout des doigts ; les frères Virgil et Turk Malloy, capables de revêtir plusieurs identités ; ou encore Yen, véritable contorsionniste et acrobate.