Critique : Kristoffer Borgli avait réussi à se faire remarquer avec son « Sick of myself », histoire d’une wannabe influenceuse qui allait loin pour tenter de se démarquer sur les réseaux sociaux. Cet instant de malaise cinématographique ne pouvait que plaire à une personnalité comme Ari Aster, devenu une des figures de l’effroi par une anxiété filmique pouvant être très dérangeante. La présence du réalisateur de « Midsommar » a donc permis au metteur en scène norvégien de réaliser son nouveau long-métrage sur des terres américaines bien à propos en ce qui concerne les interrogations médiatiques et le bouleversement du quotidien qui s’y insinue. Il faut ainsi bien admettre que ce « Dream Scenario » fonctionne alors dans son propos acide partant d’un concept loufoque.
En effet, dans une période où l’on cherche constamment à s’assurer une visibilité presque agressive, mettre en avant un professeur rustre comme personnage principal souligne l’émergence surprenante de nouvelles stars débarquant de nulle part avant de mieux retourner (ou non) dans l’oubli. Nicolas Cage offre dans ce rôle une prestation grandement réussie, captant une nature grotesque du quotidien qui le devient d’autant plus quand la célébrité survient (à l’instar d’un rapprochement physique non concluant). L’acteur prouve qu’il en a encore sous le capot quand il s’agit d’appréhender une normalité en déliquescence, le tout devant la caméra d’un Kristoffer Borgli qui appuie ce vide existentiel. Ainsi, la frontière entre rêves et réalité se rappellera par quelques excès de montage tout en étant bien servie par son écriture. Dans ce sens, la dernière partie offre quelques piques mordantes, notamment sur le rapport des français avec la « cancel culture ».
À la lisière d’un propos réactionnaire tout en cherchant à mieux s’attaquer à celui-ci, « Dream Scenario » conforte l’intérêt de son réalisateur dans l’imagerie de la célébrité furtive avec une anxiété sociale aussi forte que sa solitude. Car voilà, in fine, la véritable tragédie de cette quête à la starification : celle d’un isolement, aussi bien physique qu’émotionnel, amenant à mieux nous recentrer sur nos envies au-delà du regard extérieur. C’est dans ce drame que s’engouffre le mieux Kristoffer Borgli, avec une vision intéressante de ce cauchemar de la médiatisation…
Résumé : Paul Matthews, un banal professeur, voit sa vie bouleversée lorsqu’il commence à apparaître dans les rêves de millions de personnes. Paul devient alors une sorte de phénomène médiatique, mais sa toute nouvelle célébrité va rapidement prendre une tournure inattendue…