Valérian et la Cité des Mille Planètes, un space opéra pas pire qu’un autre
Les médias hexagonaux se font largement l’écho de la panade du nouvel opus de Luc Besson au Box Office américain. Les plus observateurs noteront la mine ravie de critiques parisiens extatiques à la lecture des chiffres de ce qui ressemble à un gadin outre atlantique, même si les résultats nationaux et internationaux pourraient éviter à la production française le naufrage complet. Pourtant Valérian et la Cité des Mille Planètes s’inscrit dans la droite lignée des récents Logan, Wonder Woman et autres Spider Man, un blockbuster techniquement impeccable mais fort pauvre au niveau profondeur de sens. Cependant, au contraire des super héros sus-cités, le film est dénué de toute inscription dans les mythologies Marvel ou DC Comics si chères au coeur des ados du monde entier. Un divertissement très bien fait mais vide, comme souvent ça ne vous rappelle rien? Tant de films sont aujourd’hui concernés par ces qualificatifs…
Une absence criante de têtes d’affiches
Impossible d’y aller par 4 chemins, ce Valérian ne brille pas par son casting. Dan DeHaan fait plus ado prépubère que héros intersidéral et la monofaciès Cara Delevigne ne brille pas par la richesse de son jeu d’actrice. Sans une carrure à la Bruce Willis comme pour le 5e élément, difficile de toucher largement le public américain et de subjuguer les foules. Et ce n’est pas un Clive Owen légèrement tombé dans l’oubli ou un Alain Chabat inconnu hors de nos frontières qui vont pouvoir sauver l’affaire. Valérian et Laureline ne font visiblement pas le poids face à l’armada d’opposants surarmés qu’ils parviennent cependant à tenir en respect tout au long de 2h18 de très long film. L’erreur initiale est là, les deux héros visent un public jeune, comme le montrent trop bien leurs incessantes interjections à base de cool. Les deux acteurs ne sont néanmoins pas taillés pour les rôles et nuisent au projet. Le cinéma d’action a besoin de vrais gueules et l’intensité des combats ne parvient pas à passionner quand une mannequin famélique et un ex-James Dean dégingandé sont de l’autre côté des flingues.
Mais alors, où est le problème?
Cette remarque mise à part, ce Valérian regorge d’action et d’humour. Il s’inscrit dans une mythologie purement hexagonale à base de combats spatiaux et de quête spatiale qui n’ont jamais passé le cap de nos frontières. Beaucoup soulignent l’inspiration trouvée par Georges Lucas dans les bulles de Christin et Mézières pour imaginer sa saga Star Wars, criant même au plagiat et au crime de lèse majesté. Ce qui peut faire rire, car le ricain a réussi à vendre sa saga, avec le succès que l’on connait. Ca sent surtout la grosse jalousie. Les bonnes idées pullulent donc tout au long du film, allant même jusqu’à rattacher la saga intergalactique à notre réalité via une scène d’introduction destinée à devenir légendaire, ne serait-ce que pour son utilisation pertinente du Space Oddity de David Bowie. Le film regorge d’effets spéciaux clinquants même si l’impression de chiqué reste inévitable, le réalisme n’est pas de mise et il faut aimer les écrans verts pour imaginer des acteurs livrés à eux mêmes face à un décor vide qui a été ajouté en post production. Ce qui est finalement devenu la norme dans tous les films Marvel ou DC Comics actuels. Luc Besson ne fait donc pas dans l’originalité technique bien que les designs et graphismes soient le plus souvent flamboyants.
Un casting de bric et de broc
Aux côtés des deux héros juvéniles, Luc Besson a réuni un casting hétéroclite. Clive Owen s’est échappé de The Knick pour interpréter un commandeur ambigu en diable. Rihanna fait une apparition hautement chorégraphiée qui ne lui demande pas beaucoup de talent d’actrice. Alain Chabat est méconnaissable tout comme la cohorte des réalisateurs français invités au casting (Benoit Jacquot, Gérard Krawczyk, Mathieu Kassowitz). Tout ce beau monde manque singulièrement de second degré pour un résultat qui ne fait pas rire aux éclats ni ne passionne vraiment. C’est joliment fait, on sent très bien les millions engloutis dans les procédés techniques mais personne ne semble vraiment à son aise. Le duo de héros interstellaires se débat dans une intrigue forcément simpliste même si les sous-entendus écologiques et sociétaux sont plutôt pertinents. Une civilisation sur le point de disparaitre essaye à tout prix de survivre et de conserver ses spécificités, c’est plutôt intéressant. Sauf que le déroulement général navigue entre show à l’américaine et intrigue à l’eau de rose. Car les deux héros se chamaillent, s’envoient des pics et tout le monde sait bien comment cela va finir. L’atrabilaire Valérian et la rebelle Laureline finiront bien par succomber à leurs charmes respectifs.
Ce Valérian et la Cité des Mille Planètes jouit des mêmes qualités et des mêmes défauts que de nombreux blockbusters actuels. Qu’il soit réalisé par Besson rajoute à la charge aux yeux de beaucoup. Ce qui n’est en soi pas vraiment objectif et pour tout dire assez facile. Car le film offre un vrai spectacle visuel, avec certes quelques longueurs malvenues et des faiblesses scénaristiques criantes. Mais à bien y regarder, cela concerne une grande partie de la production cinématographique actuelle. Donc pas de raison de bouder son plaisir, surtout que le film se regarde plutôt sur grand écran pour en prendre plein la vue.