Ceci est un remaster d’une vieille critique que j’ai écrite en 2022, avant que je ne rejoigne Culturaddict.

L’action, un genre populaire mais exigeant

Le cinéma d’action est un genre cinématographique trèèès populaire auprès du grand public. Un film d’action qui sort au cinéma va cartonner (un bon exemple: Piège de Cristal), y compris s’il sort pendant l’été (un bon exemple récent: Mission Impossible : Rogue Nation). MAIS il est cependant une chose qui ne semble pas important pour le public profane mais qui est pourtant d’une importance et d’un intérêt capitaux pour la qualité d’un film d’action: la façon d’en faire un!

On ne s’improvise pas réalisateur de film d’action sur un coup de tête sans expérience dans le domaine de l’action, sauf si on s’appelle John McTiernan (avant de faire Predator et Piège de Cristal, il a fait Nomads, un petit film fantastique avec Pierce Brosnan), et même dans un film d’un autre genre comme le super-héroïque ou la guerre, s’il y a de l’action, il faut qu’elle soit bien mise en scène, chorégraphiée et filmée (et oui, c’est déjà arrivé d’avoir de l’action mal foutue dans des bons films (coucou Batman de Tim Burton)).

J’en parlais déjà dans ma critique de Bad Boys 2. Si on exclut les films de John McTiernan, les meilleurs films d’action sont faits par des réalisateurs qui savent chorégraphier des combats et des fusillades comme il faut, et les trois meilleurs exemples sont selon moi John Woo avec The Killer, À Toute Épreuve et Une Balle Dans la Tête, Chad Stahelski avec la saga John Wick, Gareth Evans avec The Raid 1 et 2 et enfin David Leitch avec le premier John Wick, Deadpool 2 et le film qui nous intéresse ici, Bullet Train.

David Leitch

David Leitch a commencé sur le circuit cinématographique comme cascadeur et assistant réalisateur, avant de se lancer dans la mise en scène avec John Wick aux côtés de son compère Chad Stahelski (qui a suivi exactement le même parcours que Leitch, et coïncidence, les deux ont été assistants réalisateurs sur Captain America : Civil War).

La maîtrise de la mise en scène

Avec sa formation de cascadeur, Leitch est balèze en chorégraphie de scènes d’action, la preuve, les combats du film sont très très bien filmés, les chorégraphies sont jolies (même si je remarque pas mal de coupes parce que ce n’est pas une partie de plaisir de filmer toute une séquence d’action sur un seul plan, ça demande énormément de physicalité, de mise en place, de prises de risques, de temps et d’argent (Jackie Chan a dit que ça ne demande pas d’être meilleur, mais d’être patient).

Quand ça castagne, ça n’y va pas par le dos de la cuillère (et puis ça splatche en rouge!), c’est fluide, bien léché et puis les cadrages des bastons sont construits de telle sorte que les chorégraphies rendent bien à l’écran (j’en ai vu, des films d’action avec des chorégraphies corrompues et sabotées par des angles de caméra complètement pétés, coucou Mortal Kombat 1 et 2 avec Christophe Lambert).

Même au-delà des belles scènes d’action, la mise en scène est loin d’être plate et impersonnelle, il y a beaucoup de plans super cools (les angles qui tournent sur 90° et 180°), David Leitch sait mettre en scène des plans qui prennent leur temps sans faire vingt-mille coupes pour tricher, même de simples discussions (le meilleur exemple étant une conversation entre Citron et Mandarine, les deux protagonistes sont chacun d’un côté du cadre qui est placé de telle sorte que les portes des voitures du train sont situées exactement au milieu).

Ce n’est pas n’importe quel tâcheron qui saurait mettre en scène de la même manière que David Leitch. Contrairement à certains films d’action qui sont banals et fades au possible (exemples: Red Notice, Uncharted, n’importe quel Fast & Furious…), Bullet Train possède un vrai langage cinématographique, avec des plans cools, des bastons chorégraphiées aux petits oignons et de nombreux fusils de Chekhov importants pour l’intrigue et pour le propos du film (pour ceux qui ne connaissent pas, le fusil de Chekhov est à la base un procédé d’écriture littéraire qui s’est étendu au cinéma ; ce procédé consiste à insérer dans certaines scènes des détails qui auront leur importance plus tard dans l’intrigue), alors venons-en au fond.

La chance et la poisse

Dans le film reviennent de façon récurrente les principes de chance et de malchance, de nombreuses situations sont des faits de chance ou de poisse pour les protagonistes, et les exemples sont tellement nombreux, ce ne sera pas une partie de plaisir de les énumérer ppur voir si c’est de la guigne ou de la chance:

Exemples:

-après une confrontation entre Coccinelle (Brad Pitt) et Citron, Citron est assommé, et Coccinelle pimente les choses en vidant un flacon entier de somnifère dans la bouteille d’eau de Citron. Plus tard dans le film, Citron, qui boit la moitié de sa bouteille, tombe sur Le Prince (Joey King), qui essaie en vain de le berner. Alors que Citron allait tuer Le Prince, le somnifère fait effet et endort Citron sur place, ce qui permet au Prince de flinguer Citron de deux balles. GUIGNE, mais… Citron se réveille et montre son gilet pare-balles qui l’a sauvé de la mort. CHANCE

-un serpent, le boomslang, volé dans un zoo de Tokyo, se déplace tranquillou dans le train après l’ouverture accidentelle de sa cage par Coccinelle. GUIGNE

Coccinelle se fait attaquer par Le Frelon (Zazie Beetz). Elle essaie d’empoisonner Coccinelle pour le tuer avec du venin de boomslang, mais c’est lui qui lui injecte le poison. GUIGNE

Le Frelon essaie de s’injecter de l’anti-poison, mais c’est Coccinelle qui le lui prend et qui se l’injecte. Évidemment, Le Frelon saigne de partout et crève. BONNE GROSSE GUIGNE DE SES MORTS

Coccinelle se fait mordre par le Boomslang. Apeuré, il l’enferme dans les toilettes. GUIGNE, mais… Heureux hasard, il s’était injecté auparavant l’anti-poison du Frelon. CHANCE

Les acteurs

Brad Pitt, j’aime bien. J’aime beaucoup ses rôles sérieux dans L’Armée des Douze Singes, Se7en, Fight Club et Benjamin Button, mais là, pour le coup, je l’aime bien, il ne se prend pas tout le temps au sérieux, mais il quand il faut être sérieux, il l’est.

Aaron Taylor-Johnson, je l’adore dans Kick-Ass 1 et 2, mais dans le rôle de Mandarine, il est énorme, et il est classe avec son costard et sa moustache (alors que je l’ai connu imberbe dans Kick-Ass et The King’s Man)!

Brian Tyree Henry, je le connais pas très bien, je le connais pour le rôle de Phastos dans le Marvel Les Éternels, et dans son rôle de Citron, je sens une alchimie entre lui et Aaron Taylor-Johnson, ils s’échangent des punchlines, ils font des analogies avec Thomas Le Petit Train, bref ils sont drôles, et en même temps, ils sont proches comme des frères et n’hésitent pas à se couvrir!

Mais le plus classe selon moi, c’est Hiroyuki Sanada qui joue un homme âgé qui va épauler Coccinelle et lui expliquer pourquoi le nom de code Coccinelle (la coccinelle est considérée apparemment comme un animal chanceux). Et quand il se bat au katana, il a la classe, mais une classe de très haute volée!

Conclusion

Avec ses ricochets entre chance et énorme poisse, ses scènes d’action aux petits oignons et son humour noir grinçant, Bullet Train se démarque des films d’action interchangeables et OSEF grâce à un réalisateur professionnel et s’impose comme LE blockbuster d’action fun de l’été 2022, un bon blockbuster de l’été comme j’aime!

Synopsis

Coccinelle (Brad Pitt), un tueur à gages qui se dit malchanceux, est déterminé à remplir sa nouvelle mission paisiblement, jusqu’à ce qu’il se retrouve dans un train à grande vitesse (un Bullet Train) au Japon avec d’autres assassins, dont le duo Citron et Mandarine (Brian Tyree Henry et Aaron Taylor-Johnson). Ils se rendront compte rapidement qu’ils sont liés par leurs missions et leurs objectifs tout au long de ce voyage en train.