Mélodrame : voilà un de ces mots du milieu culturel qui part d’une base passionnante avant de devenir au fur et à mesure des années une forme d’injure, comme un « sous-genre » qui est artistiquement moins valide que les autres. Pourtant, pareilles œuvres existent encore et rappellent tout l’intérêt de cette orientation tonale, assumant son potentiel émotionnel quitte à mettre de côté des esprits plus cyniques. En tout cas, c’est comme cela qu’on voit ce « Contadora de peliculas », au profil plus fleur bleue dans son ancrage sentimental non dissimulé.
Prenant le temps de placer sa famille dans sa situation historique, le long-métrage de Lone Scherfig plonge dans une histoire à la dramaturgie appuyée, pouvant éveiller chez certaines personnes un sentiment peut-être un poil factice dans son traitement. C’est pourtant là que se niche le principal intérêt du film : sa résonnance entre une réalité politique morne et destructrice vers l’appel de la pellicule, l’amour de la fiction cinématographique d’époque. La façon dont réalité et irréalité se répondent pourrait sembler trop chargée d’un point de vue sentimental mais cela se retrouve totalement accepté par un long-métrage qui n’hésite pas à se confronter à cette optique de naïveté par certains chemins pris dans la narration.
Derrière un casting reconnu mais plutôt en périphérie du récit (Bérénice Béjo, Daniel Brühl, Antonio de la Torre), l’interprétation d’Alondra Valenzuela puis de Sara Becker dans le rôle principal appuie cette intention de fragilité, d’une fébrilité qui accentue cette veine affective. Les contours historiques qui vont rebondir par la suite vont par moments alourdir ce regard tout en ayant un intérêt pour ce qui s’éveille dans le regard de notre héroïne. Témoin d’un monde en changement, son rôle de narratrice, d’abord dans son cocon familial, puis dans un cercle plus élevé, rappelle à l’intérêt des histoires et autres fictions dans notre propre développement, aussi bien individuel que de communauté.
Sensible dans ses intentions, « La contadora de peliculas » démontre d’un intérêt permanent pour la fiction en tant que lien social, permettant de rappeler l’importance des histoires dans un cadre large. L’approche sentimentale pourra rebuter mais cela est tellement assumé que l’on ne peut personnellement reprocher cette envie de sincérité dans le regard émerveillé par le cinéma, que ce soit la puissance du film ou la proximité de la salle. Reste à voir si vous serez également emporté par pareille intention tonale.