Le petit landerneau de la comédie française va sérieusement s’agiter avec cette comédie intelligente et pertinente portée par un beau quarteron d’acteurs. Le fragile équilibre amoureux et amical est remis en cause le jour où la discrète et souvent indécise Léa (Bérénice Béjo) connait un succès littéraire aussi soudain qu’éblouissant, mettant à mal son orgueilleux compagnon Marc (Vincent Cassel) et sa bouillonnante meilleure amie Karine (Florence Foresti). Le résultat est une comédie de mœurs très parisienne, peut-être un peu caricaturale mais efficace grâce à ses situations comiques et ses réparties franchement drôles.
Une comédie française drôle, enfin
L’hypocrisie entre supposés grands amis, la remise en cause des équilibres dans les relations humaines, les réactions excessives face à la réussite d’un proche, le film met en scène un petit théâtre de la vie avec humour et acuité. Si les comédies françaises souffrent trop souvent d’un manque de crédibilité de leur scénario et d’acteurs paresseux se reposant sur leurs acquis, celle-ci a l’agréable avantage de pousser le concept jusqu’au bout, évitant la facilité et l’ennui. L’adaptation par lui-même de son roman L’île flottante permet à Daniel Cohen de s’appuyer sur des dialogues solides et un script déjà éprouvé, et le résultat est une comédie française enfin regardable. Le couple Bérénice Bejo–Vincent Cassel se craquelle petit à petit quand le mâle alpha voit sa position dominante remise en cause par la parution du roman de sa belle, sans tambours ni trompettes, mais pas sans dommages collatéraux. Le plus drôle reste les réactions aigries de sa meilleure amie interprétée par Florence Foresti qui se berce d’illusions sur sa capacité à écrire elle aussi un roman, remettant là aussi en cause son ascendant sur sa « petite » sœur. Francis interprété par François Damiens symbolise la lâcheté du mari n’osant pas contredire sa belle, l’entretenant dans son illusion de grandeur. Le film d’1h40 se regarde avec plaisir tant les rancœurs rentrées s’expriment auprès d’un spectateur rendu complice et témoin des pires vacheries dispensées évidemment dans le dos de la principale intéressée, surtout par une Florence Foresti décomplexée comme elle sait l’être. Les relations se disloquent, l’humanité de chacun se révèle dans sa crudité et le succès de celle présentée depuis le début comme la plus douce mais aussi la plus incompétente surprend, agace et exaspère. Le spectacle est plus que plaisant grâce à quelques situations délicieusement excessives qui font jouer le film dans la catégorie des comédies drôles et réussies. Rare pour une comédie française.
Le bonheur des uns offre une réflexion réussie sur ce qui compose une relation humaine, le meilleur comme le pire. Les acteurs font monter la chantilly avec art pour un bon moment de cinéma, surprenant dans le contexte actuel plutôt dénué de perspectives cinématographiques alléchantes.
Synopsis: Léa, Marc, Karine et Francis sont deux couples d’amis de longue date. Le mari macho, la copine un peu grande-gueule, chacun occupe sa place dans le groupe. Mais, l’harmonie vole en éclat le jour où Léa, la plus discrète d’entre eux, leur apprend qu’elle écrit un roman, qui devient un best-seller. Loin de se réjouir, petites jalousies et grandes vacheries commencent à fuser. Humain, trop humain ! C’est face au succès que l’on reconnait ses vrais amis… Le bonheur des uns ferait-il donc le malheur des autres ?