Paul Verhoeven s’attaque à la biographie d’une nonne controversée en adaptant au cinéma le livre Soeur Benedetta, entre sainte et lesbienne de l’historienne Judith C. Brown. Au XVIIème siècle, alors que l’Europe est frappée par une terrible épidémie de peste, la nonne Benedetta Carlini devient abbesse du couvent de Pescia en Toscane. Personnage mystique, marquée par les stigmates du Christ et adulée par la population locale, elle fut finalement arrêtée et jugée pour lesbianisme.
Grand admirateur de Paul Verhoeven, j’attendais beaucoup de Benedetta. Autant dire que la déception est à la hauteur de l’attente.

Bert: Vous avez dit subversif ?

Comme à son habitude, le Hollandais Violent nous miroiter un projet ambitieux, qui se veut subversif et sulfureux. Malheureusement, Benedetta propose surtout une relecture historique absurde d’un personnage controversé, accompagnée de fréquents délires onirico-religieux dignes d’une série B et quelques scènes érotiques dénuées de toute sensualité. Sur ce point précis, on est bien loin du brio de Park Chan-wook dans Mademoiselle, par exemple.
Pour le subversif, on repassera : c’est un échec pour Paul Verhoeven, le spectateur n’est en rien gêné par les scènes qui se veulent sulfureuses, mais plutôt par leur caractère artificiel et le jeu embarrassant des actrices concernées.
La longueur du film (127 minutes) n’est cette fois-ci pas un atout, certains passages s’étirant jusqu’à frôler l’ennui.

Une actrice principale dépassée

Virginie Efira, souvent brillante notamment dans Victoria ou Adieu les cons, endosse le costume d’une nonne affabulatrice et délurée à laquelle jamais on arrive à s’attacher. Si elle livre une partition convaincante lorsque le film ne sort pas des sentiers battus, elle semble dépassée dans les scènes oniriques, et frise le grotesque à quelques reprises, lorsqu’elle hurle des sermons habitée par la voix de Jésus – la parodie de L’Exorciste n’est pas loin.
Paul Verhoeven n’a cependant pas perdu son sens de l’humour, présent par salves et toujours aussi acide. Quelques excellents seconds rôles (Charlotte Rampling, Olivier Rabourdin et Lambert Wilson) et une reconstitution historique minutieuse ne suffisent pas à sauver un film trop long

Stanislas: Le grand écart entre kitsch érotique et réflexion religieuse

Disons le tout de suite: Benedetta se rapproche plus d’un nanar porno soft que d’un film véritablement clivant. La personnage principale a beau être animée de visions déroutantes, sa foi prétendument profonde laisse songeur. Elle alterne entre regards intenses (?) et poses topless répétées, difficile d’y croire, encore moins de s’impliquer. La religieuse qui monte les échelons à pas de louve manque d’un vrai charisme, la faute à une Virginie Efira qui n’y croit pas trop, sans nul doute. Soit trop légère, soit trop exigeante, elle jongle entre plusieurs postures pas vraiment compatibles, encore moins convaincantes. Autour d’elle, Lambert Wilson et Charlotte Rampling font des ecclésiastiques tout au contraire plutôt investis, l’esprit étroit et la morgue sévère. Et comme la jeune Benedetta évolue dans un environnement pas vraiment crédible, trop propret, trop moderne, le film ne parvient pas à convaincre, au contraire. Quelques scènes mieux amenées que d’autres, sans nudité oppressante ni courroux par trop simulé, parviennent à tenir le spectateur éveillé, mis c’est peu. Car la jeune héroïne part dans tous les sens, entre expériences sexuelles très premier degré et invocations christiques à l’emporte pièce, le film déroute par son faux rythme. Et comme il est par ailleurs très long, c’est à se demander si le réalisateur hollandais autrefois virtuose n’a pas perdu de sa vista, il semblerait que oui…