Critique : Scott Derrickson a su s’imposer comme un nom assez reconnaissable dans le domaine du cinéma de genre, notamment avec l’excellent « Sinister ». Après s’être retiré du tournage de la suite de « Docteur Strange », le réalisateur s’est ressourcé dans le milieu horrifique avec cette adaptation d’un roman de Joe Hill (fils de Stephen King déjà adapté avec « Horns »). Il n’est guère étonnant de comprendre pourquoi au vu de la base scénaristique intéressante et des quelques rapprochements thématiques avec sa filmographie. On pense notamment à la place accordée aux enfants dans « Sinister » ou des interrogations religieuses assez récurrentes. Pourtant, c’est la linéarité du long-métrage, et en ce sens une certaine forme de classicisme, qui frappe directement lorsqu’on lance le film.
Ainsi, « Black Phone » prend le temps de poser ses enjeux, en particulier la disparition inquiétante de plusieurs enfants. Il amène ainsi une forme de tension proche de titres plus ancrés dans les années 70-80, tout en posant le drame de son personnage principal. Si l’on sent que l’enjeu horrifique va résonner avec celui dramatique, force est d’admettre que cela se développe bien, tout en posant un rythme lent d’apparence mais croissant dans son avancée. La première vraie apparition du personnage d’Ethan Hawke met en image cet effroi suggéré, bien aidé en ce sens par l’interprétation de l’acteur.
C’est quand la bascule narrative se fait vers le fantastique que le récit accélère, jouant notamment de ce téléphone nu sur un mur. L’idée est simple, l’application est très bonne et fait résonner morts prématurées avec un besoin de survie. On pourrait regretter que la nature par instants claustrophobe des séquences soi mise à mal par l’arc de la petite sœur mais cela n’endommage que très peu le plaisir du récit. À l’inverse, l’approche fantastique faite par le film risque de déconcerter les spectateurs espérant un spectacle plus marqué vers l’horreur pure et dure, Derrickson préférant une tension sourde mais existante.
Ainsi, « Black Phone » arrive à surprendre par un classicisme narratif solide, à défaut d’être l’horreur absolue attendue. Les amateurs de cinéma fantastique devraient néanmoins apprécier le spectacle, notamment par sa construction thématique ou encore par le jeu plus subtil qu’attendu de la part d’Ethan Hawke. Reste à voir si Scott Derrickson continuera d’enrichir sa bonne filmographie de titres fantastiques hautement appréciables dans ce style.
Résumé : Finney Shaw, un adolescent de 13 ans, timide mais intelligent, est enlevé par un tueur sadique qui l’enferme dans un sous-sol insonorisé où s’époumoner n’est pas d’une grande utilité. Quand un téléphone accroché au mur, pourtant hors d’usage, se met à sonner, Finney va découvrir qu’il est en contact avec les voix des précédentes victimes de son ravisseur. Ils sont aussi morts que bien résolus à ce que leur triste sort ne devienne pas celui de Finney.