Critique : Solide artisan, Lewis Teague a vu sa carrière être mise en avant par deux films animaliers. D’un côté, « L’incroyable alligator », série B aussi acide que fun. De l’autre, « Cujo », adaptation de Stephen King que l’on ne présente plus par son attaque canine. Les deux films ayant déjà connu une sortie chez Carlotta, on n’est pas surpris de voir l’éditeur s’attaquer à un autre titre du metteur en scène. Ici, on vire vers le polar noir avec un long-métrage assez intéressant dans sa façon de repousser ses limitations.

Disposant d’un budget moindre, « Du rouge pour un truand » trouve le bon équilibre entre style d’époque et sécheresse de forme pour narrer le destin d’une femme empêtrée dans le milieu criminel. L’interprétation de Pamela Sue Martin s’avère rapidement une des plus grandes forces du film, conférant une amertume de fond dans ce récit où la violence criminelle surgit dans une époque compliquée socialement. Le destin de cette femme isolée brise alors le vernis du rêve américain, tout en renvoyant à un statut de délaissée qui passionne autant qu’il meurtrit.

Lewis Teague parvient à capter cette violence morale avec un style certain, repoussant alors les difficultés techniques pour apporter un certain cachet à son film. Cela contribue hautement à son intérêt, parvenant à mieux immerger dans cet univers brutal où cette « femme en rouge » (qui lui donne son titre original) n’est que le témoin d’un monde où les hommes imposent leurs règles, l’absence de celles-ci et la destruction des individus.

« Du rouge pour un truand » se fait alors polar des plus remarquables, récit de femme balancée dans un patriarcat destructeur avec une brutalité qui touche. Carlotta fournissant en plus une édition qualitative comme l’éditeur est habitué à en offrir, il y a de quoi redécouvrir peut-être le meilleur titre d’un des artisans américains les plus sympathiques d’un cinéma en pleine bascule des années 70 à 80.

Résumé : Violentée par un père abusif, Polly Franklin décide de quitter la ferme familiale pour Chicago. Elle sera tour à tour couturière, danseuse, prostituée et serveuse, et fera même un séjour en prison. Son parcours la rapproche du monde de la pègre des années 1930, jusqu’au jour fatidique où Polly fait la rencontre d’un certain John Dillinger…