Mon rapport à Pixar

Disney, Pixar et moi, c’est une histoire d’amour qui dure depuis que j’ai 2 ans, elle a démarré en 2003 avec Le Roi Lion, Monstres & Cie et le film dont je parle, Le Monde de Nemo. Malheureusement, cette histoire d’amour bat de l’aile depuis plusieurs années avec les remakes live-action insipides des classiques dont les exceptions se comptent sur les doigts d’une seule main et les films d’animation que Disney sort depuis La Reine des Neiges (il est peut-être resté dans les mémoires, mais c’est parce qu’il a pété les esgourdes de pléthore de parents et de grands frères (moi compris) avec sa chansonnette à la guimauve qui reste dans votre tête comme une rengaine qui tourne et tourne ET TOURNE EEEEET TOOOOOOOURNE!!!), des films complètement oubliables qui n’atteindront jamais au grand jamais le rang de classique (n’allez pas me faire croire que Vaiana ou Encanto aura la même longévité qu’Aladdin ou La Belle et la Bête). Du côté de Pixar, en dehors de Buzz L’Éclair qui était une vraie daube et Alerte Rouge qui n’était pas fait pour moi, Cars 3 qui est moyen et Le Voyage d’Arlo qui ne m’a pas laissé un souvenir impérissable, je n’ai jamais été déçu des films d’animation Pixar, y compris parmi les plus récents, notamment Les Indestructibles 2 qui est la meilleure suite Pixar qui existe avec Toy Story 2, Pixar m’a fait énormément rêver quand j’étais enfant, et me fait toujours un peu rêver (je ne peux m’empêcher de l’associer à Star Wars pour une raison qui m’échappe, mais ça me reviendra) par ses courts-métrages (les pionniers des images de synthèse dans les années 80-90) et par ses films, en première ligne Le Monde de Nemo!

Relation père-fils

Le Monde de Nemo est un film profondément ancré en moi, c’est un des rares films avec Le Roi Lion que j’ai vus dans toute mon existence qui me procure des émotions très fortes. Rien que l’histoire y est propice, mais c’est sur le tard que j’ai saisi la portée de l’enjeu principal du film, celle de l’amour d’un père pour son fils! C’est autre chose qu’une relation père-fils shakespearienne à la Hamlet telle que dans Le Roi Lion, mais c’est surtout une retranscription du vécu du réalisateur et scénariste du film Andrew Stanton, qui était à l’époque de l’écriture du scénario jeune père. Il s’inquiétait tellement pour son fils qu’il était papa-poule, et c’est ce qui lui a donné l’idée du personnage de Marin

Marin

D’ailleurs, Marin est un personnage particulièrement attachant, une figure d’une prudence poussée à son paroxysme, au point qu’elle fait souvent place à une très forte méfiance (Marin sera extrêmement méfiant avec les trois requins, Bruce, Chumy et L’Enclume (doublés respectivement par les mastodontes du doublage Richard Darbois, Patrice Dozier et Gérard Surugue), ainsi qu’avec la baleine et L’Amiral (doublé par Guy Chapellier, la voix de Roger dans American Dad, j’adore ce mec!)), mais impossible de le lui en tenir rigueur à cause de la perte de sa femme Corail et de 99% de sa progéniture.

J’en profite pour souligner le travail impressionnant, bluffant même, de Frank Dubosc pour le doublage français! Dubosc est habitué aux rôles comiques qui volent pas super haut (« on attend pas Patrick? »), mais là, il a tout compris (et ça se voit quand il explique en interview ce qu’il a dû faire), contrairement à d’autres star-talents qui restent eux-mêmes comme Jamel Debbouze au détriment du personnage, Frank Dubosc, bien au contraire, s’est complètement effacé derrière le personnage et s’est vraiment donné à fond pour bosser le personnage de Marin, j’ai vraiment senti qu’il aimait ce qu’il faisait et qu’il travaillait comme un comédien de doublage professionnel! Chapeau Frank!

Dory

Dory est exactement l’opposé de Marin, elle représente l’insouciance, la curiosité et la naïveté (interprétée par la génialissime Céline Montsarrat, la pétillante voix française de Julia Roberts), celles d’un enfant, la preuve: Marin se comportera avec Dory exactement comme avec Nemo, comme un père trop restrictif, et il fera évoluer cette relation jusqu’à devenir exemplaire. Dory est un entraînement pour Marin pour qu’il devienne un bon père pour Nemo (il prend conscience de ses erreurs dans la baleine, lorsqu’il engueule Dory (« Non non, arrête de parler baleine, tu ne sais pas parler baleine!!!

Mais si, je suis bilingue!

-Non, tu n’es pas bilingue!!! Tu crois savoir faire des choses, mais tu n’en es pas capable, Nemo!!!). Jamais entendre le nom de Nemo ici ne m’avait jamais autant affecté émotionnellement (pareil lorsque Marin et Dory sortent du banc de méduses et tombent dans les pommes: « Reste avec moi… reste avec moi… Nemo! »). Au passage, la chansonnette de Dory « Nage droit devant toi » n’est pas une banale rengaine chiante, c’est une leçon de vie que Marin est encore incapable d’entendre et d’assimiler au début lorsque Dory la lui chante après la chute de l’épave et du masque de plongée (« Dis donc, monsieur le grincheux de service! »), pareil lorsque Marin et Dory sortent du courant est-australien pour repartir à la recherche de Nemo. C’est lorsque Marin dit aux poissons piégés dans le filet de nager tous ensemble vers le fond qu’il assimile sans le savoir cette leçon en criant aux poissons « Continuez à nager, droit devant allez! Voilà, droit devant, c’est ça, droit devant!

Nemo

Quant à Nemo, il est une synthèse des mauvais côtés de l’extrême prudence de Marin. Alors qu’il est lassé par la surprotectivité de Marin envers lui jusqu’à sa capture par le dentiste Philip Sherman (doublé par Patrick « Tigrou » Préjean), Nemo prend exemple sur son père lorsqu’il se sent en danger, ce qui est normal pour un enfant, cependant c’est loin d’être à son avantage (Nemo a souvent tendance à reculer lorsqu’il a peur, c’est ainsi qu’il prend peur en voyant une des trois statues Tikki décoratives et en se retrouvant coincé dans le tuyau d’aération)

Ce qui est arrivé à Nemo, son kidnapping et sa captivité dans l’aquarium de Philip Sherman, mais surtout le voir séparé de son père, c’est horrible, on a tous eu peur pour Nemo et éprouvé une grande tristesse et une grande empathie pour Marin, et la scène de l’enlèvement et celle où Marin se perd dans l’immensité de l’océan, symbole de la perte de repères de Marin lorsqu’il s’enfonce dans l’inconnu, elles arrivent aussi à me mettre les larmes aux yeux tellement elles sont puissantes, et je suppose que la musique de Thomas Newman y est pour quelque chose, elle me fout des frissons! Cependant, si on réfléchit deux secondes, était-ce vraiment une si mauvaise chose pour les deux protagonistes? Lors de sa captivité dans l’aquarium du dentiste, Nemo apprend à se dépasser, d’abord au profit de Gil uniquement, mais ensuite de façon salutaire pour l’ensemble des captifs, et par conséquent à avoir confiance en soi et ensuite pour garder l’espoir de pouvoir s’échapper. Nemo a eu besoin de Gil pour que sa confiance, son courage et sa témérité puissent enfin prendre le pas sur la peur et la méfiance qui les étouffent depuis le début de sa vie.

Gil

Gil, de son côté (au passage, doublé par Dominique Collignon-Maurin, la voix française de Nicolas Cage, Kevin Kline et Willem Dafoe), connaît une évolution positive grâce à Nemo. D’abord désireux uniquement de s’évader de l’aquarium pour retourner dans l’océan, il se servira de Nemo dans un premier temps pour que son plan arrive à exécution, et c’est lorsque son plan échoue et qu’il met Nemo en danger de mort qu’il réalise la vacuité de son plan. Personnellement, cette scène me met au bord des larmes, y compris le court dialogue entre Astrid (la défunte Martine Meiraeghe, première voix française d’Edna Krapabelle dans Les Simspon et voix de Katey Sagal dans Sons of Anarchy) et Gil.

« Gil, ne l’oblige pas à y retourner.

-Non… c’est fini… »

Des évolutions

Cet échec va plomber Gil jusqu’à le faire renoncer à la liberté, rongé par les remords. L’échange entre Nemo et Gil me fait de la peine chaque fois que je l’entends. (« […] C’est moi qui suis désolé. J’avais une telle soif de liberté, un tel désir de retrouver l’océan. Je n’ai pas hésité à te faire courir de gros risques. Rien ne peut justifier ça. Je regrette vraiment de ne pas t’avoir permis de retrouver ton père. »)

Si la capture de Nemo a été finalement salutaire pour ce dernier, Marin aussi tirera avantage de ce drame. En voyant Nemo se faire enlever, il se risque à s’éloigner de son récif pour retrouver Nemo, il arrivera par ses rencontres à se dépasser et à se servir non plus de la peur mais du courage comme booster pour son périple qui le mènera jusqu’à retrouver son fils, à commencer par Dory, et ensuite la tortue Crush (et j’aime bien le travail de Samy Naceri sur le personnage au doublage!) qui lui apprendra à laisser son fils se débrouiller par lui-même et respirer pour s’épanouir! C’est lorsque Dory se fait attraper par le filet de pêche que l’évolution de Marin et de Nemo auront leur utilité, Marin fait confiance à Nemo et le laisse agir et Nemo met en pratique ce qu’il a appris avec Gil (faire preuve de courage et nager vers le fond)

La musique

La musique de Thomas Newman joue beaucoup sur les émotions que procure le film, en plus de s’inspirer de la musique australienne (quelques inspirations du groupe de pop-rock australien Men At Work et l’utilisation d’instruments exotiques (qui ne sont pas nommés, c’est embêtant), entre autres)

Le doublage

En VO, on a une ribambelle d’acteurs talentueux comme Albert Brooks (Taxi Driver), Willem Dafoe, Geoffrey Rush, Eric Bana, Bruce Spence, Allison Janney, Stephen Root, ainsi que des star-talents comme l’animatrice télé américaine Ellen DeGeneres et l’humoriste australien Barry Humphries, mais c’est la VF qui l’emporte haut la main, son casting, c’est le haut du panier, avec déjà Frank Dubosc qui a fait un travail extraordinaire sur Marin, il ne se contente pas de mettre sa voix sur un personnage d’animation, il s’est imprégné du personnage de Marin (et franchement, j’ai tout pour Marin, de la peine, de la compassion, de l’empathie, de l’attachement, tout), ensuite Céline Montsarrat éclatante sur une Dory qui a conquis tout le public (elle est adorée par tous les fans de Pixar), Dominique Collignon-Maurin sérieux mais non moins excellent sur Gil, Richard Darbois, Gérard Surugue et Patrice Dozier qui composent un trio déjanté mais très sympathique (qui n’aurait pas de la sympathie pour trois requins qui ont arrêté de manger du poisson et qui font toutes les semaines une réunion à la Alcooliques Anonymes?), Patrick Préjean sur Philip Sherman, Martine Meiraeghe sur Astrid, Guy Chapellier sur L’Amiral, Emmanuel Jacomy sur M. Raie, Nicolas Marié sur Bubulles (il adore les bulles!!!), Med Hondo sur Boule (paix à son âme, c’était un des meilleurs comédiens de doublage qui soient!), Philippe Catoire sur le banc de poissons qui fait des imitations, Samy Naceri sympatoche sur Crush, et puis David Ginola sur la crevette Jacques, euh… balek.

Conclusion

Amour père-fils, dépassement de soi, relations « humaines », confiance, courage, compassion, sous ses airs de film d’animation tous publics, Le Monde de Nemo est une magnifique leçon de vie avec plusieurs niveaux de lecture plus profonds les uns que les autres, un film que tous les pères se doivent de regarder avec leurs enfants, puisqu’il s’adresse autant aux uns qu’aux autres, il apporte vraiment quelque chose d’important dans le lien entre un père et son fils, et réciproquement c’est le lien entre un père et son fils qui permet de mieux apprécier les propos du film, je dis ça parce que c’est en me rapprochant de mon père à partir de mon adolescence que je comprends aujourd’hui le film dans son entièreté.

Synopsis

Marin, un poisson-clown veuf, s’occupe de son fils Nemo de manière très protectrice voire en mode maman poule, à la grande consternation de Nemo, qui décide sur un coup de tête d’aller toucher une barque. Après avoir touché le bateau, Nemo se fait capturer par deux plongeurs qui passaient par là et se fait emmener dans la barque qui prend le large, Marin, désespéré, fonce à sa poursuite jusqu’à le perdre et fait la rencontre de Dory, poisson extravagant avec une mémoire de poisson rouge (sans mauvais jeu de mots). Nemo, de son côté, se retrouve dans l’aquarium d’un dentiste à Sydney et fait la rencontre d’un groupe de poissons (plus une crevette et une étoile de mer) qui tente depuis longtemps de s’évader de l’aquarium pour retourner dans l’Océan.

Cette chronique est dédiée à mon papa, qui a subi des milliers d’heures de visionnages du Monde de Nemo et du Roi Lion quand j’étais petit🤣.