D’ici quelques jours sortira le film Downton Abbey, qui fera suite à la série du même nom. L’occasion pour moi de revenir en quelques mots sur six saisons de qualité narrant l’épopée de la famille Crawley et de ses servants.

Une longue épopée

Downton Abbey s’apprécie sur la durée. Si chaque saison possède une intrigue principale ainsi que plusieurs autres péripéties mineures, l’intérêt de la série repose plutôt sur l’évolution des personnages et de la société de manière plus globale. En effet, elle commence en 1912 après le naufrage du Titanic, et se finit en 1925. On suit donc la noble famille Crawley ainsi que son personnel sur treize ans, ce qui permet de voir les caractères de chacun fluctuer et s’affirmer. Certains personnages, comme Edith, prennent de l’importance au fur et à mesure des saisons, passant de rôle « secondaire » à un rôle quasi principal à la fin de la série. On se prend également d’affection pour des personnages que l’on détestait au départ, comme le valet Thomas Barrow qui, s’il semble imbu de lui-même et manipulateur dans un premier temps, révèle par la suite ses failles et son véritable caractère, ce qui le rend d’autant plus attachant.

Lady Edith se révèle être un personnage assez complexe.

Le deuxième niveau d’évolution concerne la société. Downton Abbey pose en toile de fond une fresque historique de treize ans, qui voit les femmes s’affirmer à travers le mouvement des suffragettes, les tenues vestimentaires de Mary, qui se masculinisent peu à peu, ou bien les rôles de plus en plus importants que les femmes jouent dans la société, la libération des moeurs, à nouveau avec Mary ou dans le fait que les domestiques puissent se marier au fur et à mesure de la série, et bien sûr, la fin des familles nobles. En effet, si les grandes familles anglaises avaient une influence incommensurable avant la Première Guerre Mondiale, faisant parfois vivre une communauté entière, cette dernière altérera progressivement leur pouvoir, les rendant moins importantes. Cette thématique est abordée plus ou moins subtilement sur les trois dernières saisons, et offre un degré de lecture plus subtil à ceux qui s’intéressent de près ou de loin à l’histoire anglaise

Une production dantesque

Ce qui fait également la qualité de Downton Abbey, c’est sa production. Que ce soit dans les décors ou les costumes, tout paraît d’époque. Il faut dire que la série a bénéficié d’un budget d’un millions de livres sterling par épisode, ce qui, pour une série britannique, est un montant colossal.

Le château, qui se trouve en réalité au sud de l’Angleterre à Highclere, est le principal décor de la série. Pouvoir tourner dans Highclere Castle a permis à l’équipe de bénéficier d’un cadre incroyablement réaliste pour tourner une série se passant dans les années 1910 et 1920, ce qui ajoute grandement au plaisir de visionnage. Néanmoins, certains décors, notamment ceux de Hyde Park à Londres, sembleront parfois un petit trop contemporain, mais rien d’assez gênant pour sortir le spectateur de la série.

Highclere Castle, principal lieu de tournage de la série

De même, les costumes sont incroyablement variés et réalistes, bien qu’ils aient été loués, achetés d’occasion ou réutilisés dans d’autres films, le budget ne permettant pas de créer des costumes de A à Z pour chaque épisode (plus de 1200 tenues différentes ont été nécessaires pour les cinq personnages féminins principaux).

Les acteurs et actrices, inconnus avant le tournage (à quelques exceptions notables, notamment Maggie Smith qui incarne la cynique Violet Crawley à la perfection) portent la série sur leurs épaules. Chacun d’entre eux sonne juste, dans leur posture, leurs manières, leur langage, leur attitude et bien sûr leur jeu d’acteur. Le recrutement d’un conseiller historique pour aider à respecter les codes sociaux de l’époque y est sûrement pour beaucoup.

Les costumes d’époque aident à se plonger dans l’atmosphère de Downton Abbey.

Enfin, la qualité de l’écriture est elle aussi au rendez-vous. Chaque saison est bien équilibrée, entre humour, drame et moments de tendresse. Les dialogues respectent l’étiquette, notamment entre les nobles et les domestiques, et certaines répliques, en particulier celles de Violet Crawley, sont cyniques à souhait. La seul ombre au tableau sur ce point réside dans la fin de la série qui semble un peu trop rapide au dernier épisode, concluant en une heure toutes les intrigues restantes.

Si vous cherchez une série pour vous occuper plusieurs heures, Downton Abbey est la série pour vous. Épopée humaine et historique passionnante d’une qualité indéniable, nul doute que le film sera du même calibre.