Prélude
Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal est un film qui a énormément divisé le public. La presse l’a plébiscité, il a des défenseurs et des partisans, moi compris (ainsi qu’un certain Quentin Tarantino) et c’est le but de cette chronique, mais il s’est mis à dos les fans hardcore de la saga Indiana Jones, au point d’avoir été renié par les puristes de la saga, considérant cette dernière comme une trilogie.
À titre personnel, j’ai regardé Le Royaume du Crâne de Cristal après avoir regardé les trois premiers opus à la suite, et je l’ai énormément apprécié, à un point tel qu’il m’a davantage plu que ses prédécesseurs (allez-y, traitez-moi d’hérétique, je vous y autorise).
J’ai beaucoup de choses à dire sur ce film controversé, il est temps qu’il dispose d’un avocat!
Les extraterrestres, une légende au même titre que les autres
Les détracteurs d’Indiana Jones 4 reprochent au film la présence des extraterrestres. Pourtant, Roswell et le hangar de la zone 51 sont des mythes, exactement comme la cité d’Eldorado, le Saint-Graal, la déesse hindoue de la mort Kali et l’Arche d’Alliance, seulement ces deux mythes nous sont plus contemporains que les autres et ils sont typiquement américains. Quant aux extraterrestres en eux-mêmes, ils ont effectivement été surexploités au cinéma et dans la pop-culture, par conséquent la sortie du Royaume du Crâne de Cristal en 2008 n’innove pas tellement, mais est-ce une mauvaise chose?
Ce n’est ni une bonne ni une mauvaise chose, en somme. Le plus important à mon sens n’est de réutiliser un thème utilisé énormément de fois, le plus important est la façon de réexploiter le thème en question. La Couleur Tombée du Ciel, Le jour où la Terre s’arrêta, Star Trek, Battlestar Galactica, Rencontres du Troisième Type, Alien, The Thing, E.T., Invasion Los Angeles, Predator, Stargate, Mars Attacks, Transformers (oui, je mentionne Transformers, alors pouêt pouêt!), Les Âmes Vagabondes (on se moque pas, siouplé, je l’ai regardé pour Saoirse Ronan et Andrew Niccol) ou Premier Contact, les exemples sont nombreux et variés.
Ici, David Koepp, George Lucas et Jeff Nathanson ont réexploité le thème des extraterrestres de façon intelligente et logique dans le contexte du film et également par rapport à la saga. Le Royaume du Crâne de Cristal se déroule dans les années 50, le mythe de Roswell existait déjà et les théories sur les OVNIS prenaient leur essor aux États-Unis, insérer les extraterrestres dans le scénario a du sens. En outre, les extraterrestres dépeints dans le film et la soucoupe volante à la fin sont inspirés des récits de science-fiction des années 50, ce qui correspond à la situation temporelle du film.
Les images de synthèse: une si mauvaise chose?
C’est un autre reproche qui est fait au film: la présence d’images de synthèse. C’est une rupture totale par rapport aux trois premiers volets, certes, mais nous étions en 2008, ne faut-il pas s’adapter à son temps? Après tout, George Lucas, de son côté, a bien eu recours au numérique pour la prélogie Star Wars. Dans le cas d’Indiana Jones, le numérique est peut-être un peu surexploité (les fourmis tueuses font effectivement un peu faux, mais c’est loin d’être un problème majeur), mais dans l’ensemble, on ne peut pas dire que c’est un gloubiboulga d’effets spéciaux moches, ça reste beaucoup plus agréable à regarder que les effets spéciaux dérisoires de nombreux blockbusters sortis ces dernières années.
La scène du frigo: si ridicule que ça?
Je ne comprends pas en quoi la scène du frigo est ridicule. Elle est irréaliste, c’est vrai, je l’accorde, mais en même temps, vous allez pas me dire que l’atterrisage et la descente en bateau gonflable dans Le Temple Maudit sont plus réalistes?
Ayant analysé la scène, je vous en fais un récapitulatif:
Indiana Jones et les militaires soviétiques qui le pourchassent arrivent dans une maquette de banlieue de ville grandeur nature en plein milieu de nulle part.
Une alarme retentit et une voix donne des consignes de sécurité.
Les soviétiques s’enfuient dans leur voiture, laissant Indy au dépourvu.
Tout le monde a suivi jusqu’ici?
Indy, ne sachant plus que faire, cherche un endroit où se cacher plutôt que de fuir en courant (en effet, se réfugier dans une cachette résistante est une bonne alternative pour se protéger d’une explosion).
Il se cache dans un frigo doté d’une isolation en plomb (je ne sors pas ça de mon chapeau, c’est marqué sur le frigo et c’est parfaitement lisible à l’image).
C’est bon, vous arrivez toujours à suivre?
L’explosion se produit et s’étend sur le site. Les soviétiques se font rattraper par l’explosion et meurent. Le frigo de plomb fait des loopings et s’écrase au loin. Indy sort du frigo, déboussolé.
Si Indy s’était enfui en voiture, l’explosion n’aurait fait qu’une bouchée de lui!
Je trouve que cette scène reste logique. Quand bien même elle est irréaliste, l’univers d’Indiana Jones n’a jamais été dépeint comme réaliste, et la scène du frigo s’inscrit parfaitement bien dans l’univers cartoonesque de la saga. Un frigo isolé en plomb qui fait des loopings comme si c’était un tupper-ware vide ne peut intrinsèquement pas être réaliste, mais est-ce qu’irréaliste veut forcément dire que ce n’est pas crédible? Je vais donner un exemple d’un autre volet des aventures d’Indiana Jones:
Dans Le Temple Maudit, Indy, Willie et Demi-Lune se retrouvent à sauter en parachute et dévaler le versant d’une montagne dans l’Himalaya, le tout avec un bateau gonflable. Cette scène est tout sauf réaliste, pour autant elle reste crédible, ça fait partie des côtés cartoonesque et rocambolesque de la saga, c’est même normal de voir ça dans un film d’aventure. Si une descente de montagne en bateau gonflable est arrivée à être acceptée, je ne vois pas pourquoi un frigo faisant des loopings après avoir été propulsé par une explosion nucléaire ne le pourrait pas.
Casting quatre étoiles
Qui dit Indiana Jones dit évidemment Harrison Ford, et contrairement à l’idée que se font les détracteurs sur la condition physique des acteurs qui ont atteint un certain âge, Ford est bien portant et bien en forme, pour un vioque. Il ne fait probablement pas toutes ses cascades, mais il est loin d’être un vieux croûton. Il avait seulement 65 ans sur le tournage et 66 lors de la sortie du film, ce qui n’est pas si vieux. Après tout, pour prendre un autre exemple, Sylvester Stallone avait la soixantaine lorsqu’il est remonté sur le ring pour le sixième volet de la saga Rocky, Rocky Balboa, et lorsqu’il a remis son bandana dans John Rambo, le quatrième opus de la saga Rambo, même chose lorsqu’il a lancé la saga Expendables en 2010. En outre, Harrison Ford est très actif sur les tournages pour les rôles physiques comme Indiana Jones, il y va tellement franco qu’il en est déjà venu à se casser le bras.
Cate Blanchett cabotine de façon amusante dans le rôle d’Irina Spalko, militaire soviétique brillamment caricaturale et kitsch, à l’instar d’autres antagonistes de la saga Indiana Jones (le colonel Arndold Ernst Toht et le prêtre Mola Ram, entre autres).
Karen Allen est de retour en Marion Ravenwood, toujours prompte à tacler Indy, et ça fait bien plaisir!
Shia Labeouf n’est pas si mauvais dans le rôle de Mutt Williams. Je n’ai pas grand chose à dire sur lui, il me laisse totalement indifférent. Je ne vais pas dire qu’il malmène le récit, que c’est un boulet ou qu’il m’exaspère parce que ce n’est pas le cas, cependant il n’est pas attachant.
De son côté, Ray Winstone est un peu lourd et pas attachant pour un sou dans le rôle de Mac, il retourne sa veste autant de fois qu’il n’y a de masques dans Mission: Impossible 2 et il passe son temps à hurler « JONESYYYYYYYYY!!! ».
En remplacement de feu Denholm Elliott, interprète de Marcus Brody dans Les Aventuriers de l’Arche Perdue et La Dernière Croisade et dont on voit une statue à son effigie dans le campus de l’université où enseigne Indy, Jim Broadbent joue son successeur en tant que doyen de l’université, un rôle tertiaire mais plaisant.
Un autre acteur sorti de nulle part pour la saga: le regretté John Hurt, connu pour le rôle de Caine dans Alien, Le Huitième Passager, de Winston dans le film 1984 ou d’Ollivander dans Harry Potter à l’École des Sorciers, interprétant ici Harold Huxley, ami de longue date d’Indy et mentor de Mutt. Un rôle difficile à cerner car propre au film, cependant pas inintéressant, avec un peu d’imagination.
Et puisque l’on parle des acteurs:
Le doublage français
Indiana Jones, c’est obligatoire, ça se regarde en VF (n’en déplaise à mon co-rédacteur Bertrand Dévigne). Les Aventuriers de l’Arche Perdue a Claude Giraud et Marc Cassot pour les voix d’Indy et de Bellocq, Le Temple Maudit a Francis Lax, Jackie Berger, Béatrice Delfe et Henry Djanik pour les voix d’Indy, Demi-Lune, Willie et Lao Che et La Dernière Croisade a Richard Darbois, Jacques Frantz, Jean-Claude Michel, Jacques Ciron, Céline Montsarrat et Pierre Hatet pour les voix d’Indy, Sallah, Henry Jones Sr., Marcus Brody, Elsa Schneider et Walter Donovan. Pour Le Royaume du Crâne de Cristal, nous ne sommes pas tellement en reste, non seulement avec Christian Dura pour l’adaptation, mais Jean-Philippe Puymartin (la voix française de Tom Hanks), ici directeur artistique, s’est fait plaisir: Richard Darbois double à nouveau Indy, pour notre plus grand plaisir, Alexis Tomassian (la voix du prince Zuko dans Avatar: Le Dernier Maître de l’Air) double Mutt Williams, Martine Irzenski double Irina Spalko, Frédérique Tirmont (la voix française de Meryl Streep et Emma Thompson) double Marion Ravenwood, Bernard Dhéran (la défunte voix française de Sir Ian McKellen) double le doyen de l’université joué par Jim Broadbent, Jean-Pierre Leroux (la voix française de Derek Jacobi et d’Egon Spengler dans SOS Fantômes) double Harold Huxley, Patrick Béthune (la défunte voix française de Kiefer Sutherland dans 24 Heures Chrono) double Mac et Marc Cassot double le général de l’armée américaine pote avec Indy. C’est du beau casting vocal!
Conclusion
Un scénario dans les clous des codes de la saga culte mais réactualisé sur fond de mythe contemporain mais digne de faire partie de la saga, un film d’aventure sympathique et efficace aux accents de nostalgie présents à bon escient porté par un Harrison Ford bien en forme et une Cate Blanchett délicieusement kitsch, Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal mérite réévaluation, et bien que méprisé par les puristes, ce film a trouvé son public à sa sortie et l’a toujours. Et sur ce point, messieurs les jurés, je conclus ma plaidoirie!
Synopsis
En pleine guerre froide, le professeur Indiana Jones vient d’être renvoyé de son université à cause de ses activités d’archéologue. Il rencontre alors un jeune motard, Mutt, qui propose de le mettre sur la piste du crâne de cristal d’Akator, une relique qui permettrait à son propriétaire de contrôler l’univers mais une unité de militaires Soviétiques, dirigée par Irina Spalko, veut elle aussi mettre la main sur la fameuse relique.