Il existe de nombreux films qui sortent en salles auréolés de critiques dithyrambiques avant de se voir rejuger de manière plus négative quelques temps plus tard. Au vu des remarques négatives de plus en plus vues par l’auteur de ces lignes sur le Gravity d’Alfonso Cuarón, il était temps d’y revenir, voir si celles-ci sont fondées.

Lors d’une mission de réparation, Ryan Stone et Matt Kowalski se retrouvent coincés dans le vide spatial. Vont-ils s’en sortir ?

Interprétations multiples

Le résumé que je viens de vous faire est extrêmement simpliste et pourrait vous faire croire que ceci n’est qu’un simple Survival dans l’espace. Pourtant, quand l’on gratte la surface, il faut reconnaître qu’il y a tellement plus derrière. Pour commencer, l’intrigue est efficace. En effet, les nombreux rebondissements qui se suivent dans l’action permettent une empathie totale pour les personnages, en constant danger de mort. Ainsi, chaque incident qui survient sur leur parcours permet de les caractériser tout en apportant une autre signification à l’histoire. C’est ainsi que, comme Mad Max Fury Road par exemple, l’aspect « simple » de la narration ouvre aux lectures toutes aussi passionnantes les unes que les autres. Je vous recommande ainsi l’avis du  Ciné-Club de Monsieur Bobine sur sa chaîne Youtube. La lecture qui va être mise en avant ici est plus visible mais prouve que le film n’a pas été écrit de manière automatique.

Récit d’un deuil

Attention, ce paragraphe contient des spoilers. Il est donc conseillé de le lire après avoir vu le film.

Il s’avère ainsi que Ryan Stone a subi il y a quelques temps le décès de sa fille, un décès qu’elle a du mal à surmonter. C’est ainsi qu’on peut faire le lien entre cette mort et les accidents qu’elle devra affronter. Au cours du film, elle se verra confrontée à un événement mortel provoqué par un être humain (une réplique lâchera que les débris provoquant la destruction de la station sont dus à un tir de missile). Stone devra alors laisser partir la personne responsable de sa survie (sa fille/Kowalski) et accepter sa mort. Cette acceptation la remettra en situation de renaissance d’un point de vue mental et physique (ce magnifique plan où on la voit en position foetale en apesanteur) et devra lui permettre de se battre pour survivre aux dégâts de l’accident (vécu ici à une plus grosse échelle pour ressentir le chamboulement émotionnel de Stone) afin de revenir face à la réalité et remettre les pieds sur Terre.Il est amusant de constater que la tagline du film (« don’t let go ») s’avère à l’opposé du message du film (laisser partir la douleur du deuil passé) On peut donc voir en Gravity le récit d’un deuil dans la situation instable émotionnellement, le tout vécu en immersion.

La technique au service de l’intrigue

Même sur petit écran, Gravity se vit en effet de manière immersive, essentiellement grâce à la mise en scène prodigieuse d’Alfonso Cuarón . Son usage des plans séquences n’est pas le fruit d’une simple esbrouffe visuelle mais nourrit son intrigue. La première séquence introduit nos personnages ainsi que l’action, permettant également à celle-ci d’intervenir de manière plus brutale encore au vu du calme montré plus tôt. On suit donc au plus près nos protagonistes au vu de leur manière d’agir au vu de la catastrophe. La caméra se rapproche tellement qu’elle passe par instants à l’intérieur du casque, nous obligeant à suffoquer avec nos héros. Impossible également de ne pas souligner les effets d’un film se rapprochant plus de l’animation que du film live. Le tournage dut être extrêmement précis pour les acteurs ainsi que leurs gestes afin d’assurer leur crédibilité à l’écran dans des scènes qui n’auraient pu être possibles sans les évolutions du numérique. Mais aucun effet spécial ne pourra remplacer l’émotion humaine (d’où la principale raison de ne pas avoir tourné le film entièrement en images de synthèse). Sandra Bullock et Georges Clooney apportent de la personnalité et de l’empathie dans leurs interprétations, également appuyées par des répliques qui sonnent vraies et permettent également de mieux façonner leur personnalité.

En fin de compte, il y aurait trop à dire sur Gravity tant ce film regorge d’idées et constitue l’un des piliers du cinéma de ces dernières années. Plus qu’un « simple divertissement qui se finit bien », c’est une oeuvre forte, bouleversante et spectaculaire qui mérite en effet les louanges qui l’entourent. Et quand un film reçoit autant de bons retours, peut-être vaut il mieux de temps en temps se demander pourquoi en grattant la surface que faire le faux rebelle en le critiquant sans chercher plus derrière…