Yvan Attal et Pierre Arditi figurent le mythe d’Œdipe dans un face à face musical qui tient toutes ses promesses. Le fils et le père sont tous deux chefs d’orchestre et la renommée grandissante du premier met à mal l’orgueil déçu du second. Mais quand le second apprend sa nomination à la tête de la célébrissime Scala de Milan, l’espoir renait… le film est surtout une question fascinante sur l’identité et la filiation, le tout en musique, c’est grandiose.

Un drame en musique

Quel bonheur d’entendre au cinéma Beethoven, Mozart, Schubert, Brahms et Rachmaninov. Surtout que la musique joue un rôle central dans l’intrigue à travers les différentes interprétations que peuvent en donner les chefs d’orchestre. Chacun son oreille, chacun son style, préfigurant la rivalité entre le père et le fils. Surtout que tous deux portent le même nom de famille, début d’un quiproquo malheureux sur cette fameuse nomination à Milan. Le plus jeune est sur le haut de la vague, reconnu pour son talent à bousculer les codes, le plus âgé est plutôt sur le déclin après des années fastes. Le film insiste bien sur la spécificité du métier de chef d’orchestre, ce n’est pas seulement un travail, beaucoup de soi-même accompagne l’œuvre du maestro, une remise en cause peut être à l’origine d’une dépression, la reconnaissance gonfle l’ego hors de toute mesure. La scène centrale du film passe quasi inaperçue, l’ainé entend la musique de son fils à la radio pendant un trajet en taxi. L’exaspération ne tient pas seulement au rappel de la récompense obtenue lors d’une soirée télévisuelle, mais peut-être aussi à l’interprétation donnée. Chaque chef d’orchestre entend la musique dans sa tête et celle de la radio semble rendre malade le père particulièrement hirsute, symbolisant ainsi le fossé creusé entre eux deux. Là tout se joue tout le fond du film. Le père ne reconnait pas la talent du fils, il le refuse même, il aurait voulu que son fils partage sa propre vision de la musique, sans aucune touche personnelle. Tout le reste suit. Les vies familiales différentes, les tempéraments différents, c’est un peu manichéen mais pas sans saveur. La scène finale est un plaisir au son de l’ouverture des Noces de Figaro… mais n’en disons pas plus!

Maestro(s) est un film beaucoup plus profond et complexe que ce que la bande annonce simpliste laisse entrevoir. C’est une bonne surprise, le cinéma français semble avoir encore quelques raisons d’espérer un avenir radieux.

Synopsis:
Chez les Dumar, on est chefs d’orchestre de père en fils : François achève une longue et brillante carrière internationale tandis que Denis vient de remporter une énième Victoire de la Musique Classique. Quand François apprend qu’il a été choisi pour diriger la Scala, son rêve ultime, son Graal, il n’en croit pas ses oreilles. D’abord comblé pour son père, Denis déchante vite lorsqu’il découvre qu’en réalité c’est lui qui a été choisi pour aller à Milan…